Bakou, apprécie ainsi cette politique en lui écrivant le 14
mars : « Votre politique efficace et résolue nous ravit. Tâchez
de l'harmoniser avec une diplomatie souple, conditionnée par
un particularisme et une situation compliquée, et nous
vaincrons (28). »
Le 12 mars, la prise d'Erzeroum par les Turcs encourage les
moussavatistes à passer à l'action directe contre le soviet. Ils
renforcent auparavant leur formation militaire créée par leur
comité national et composée d'éléments de la Division Sauva–
ge (29) retour du front occidental.
Aidés par les émissaires turcs qui fomentent des troubles
dans les régions musulmanes, et notamment au nord de
Bakou, au Daghestan, où l'imam Gotsinski, hostile aux
bolcheviks, s'empare le 25 mars du port de Petrovsk (l'actuel
Makhatchkala) privant ainsi Bakou de communications avec le
Nord d'où vient son ravitaillement en blé, les moussavatistes se
rendent maîtres au sud, de Lenkoran, autre port de la
Caspienne. Pour échapper à l'encerclement qui les menace, les
bolcheviks envoient des troupes dans ces directions et arrivent
le 14 mars à dégager Lenkoran. Les moussavatistes demandent
des renforts à leur état-major de Bakou et le 29 mars, un
détachement commandé par Assadoulaev, fils d'un million–
naire de Bakou, s'embarque à l'insu des bolcheviks sur le
navire
Evelina
pour porter secours à leurs compatriotes mis en
mauvaise posture à Lenkoran. Le soviet envoie les gardes
rouges pour s'emparer du navire. Ils sont accueillis par un feu
nourri mais réussissent à désarmer leurs adversaires. L'incident
met le feu aux poudres. Le 30 mars, une délégation de
moussavatistes conduits par Rassoul Zadeh se présente au
comité exécutif du soviet et exige la remise des armes.
Afin d'éviter un conflit susceptible de prendre un caractère
intercommunautaire, ce que les bolcheviks veulent éviter, le
comité militaire révolutionnaire propose de remettre les armes
entre les mains du parti
Hùmmet,
ce que les moussavatistes ne
peuvent accepter. I l s'ensuit un affrontement sanglant auquel
participent plus de 20 000 hommes ; en trois jours, du 30 mars
au 1
er
avril, on comptera des deux côtés 3 000 tués ou blessés.
Le Conseil arménien, qui dispose d'autant de troupes que les
bolcheviks, décide d'abord de rester neutre dans le conflit.
(28)
Lénine,
O.C.
(135),
vol. I, pp. 104-108.
(29)
Formation musulmane créée par les Russes pendant la guerre.
51
Fonds A.R.A.M