plus c r i t i que . Des maisons avaient été forcées, les officiers et les agents de police
paraissaient devoir être impuissants à s'opposer au mouvement . Soit hésitation de la
part des Tur c s , soit influence réelle d u Gouverneur, toujours est-il que Gadri Bey
parvint, momentanément, à empêcher de déplorables violences. L a t r oupe eut le temps
d'arriver ; la première excitation était d'ailleurs passée, la nu i t assez avancée rendait
la tentative mo ins facile et t o u t rentra dans u n calme relatif.
E n réponse aux questions q u i l u i f ur en t posées relativement aux mesures q u ' i l
comptait pr endr e p ou r prévenir u n nouveau soulèvement, que l ' on annonçait ouve r –
tement pour le soir même , Cadn Bey énuméra les dispositions arrêtées. C'était en
p r emi e r l i e u une action énergique de l'autorité sur les chefs de quartier et les notables
musulmans, rendus personnellement responsables de l ' o rdr e . D' aut r e p a r t , les p r i n –
cipaux Arméniens devaient être invités à empêcher toute provocation de la part de
leurs coreligionnaires ; les gendarmes devaient être renforcés par les zaptiés des loca–
lités voisines ; la f o rma t i on d'un corps de veilleurs de n u i t et d'agents auxiliaires de
police était décidée. Un bataillon supplémentaire d'infanterie, réclamé à la plus v o i –
sine garnison, ne tarderait pas à arriver, et enfin on p ou r r a i t r e c our i r , en cas de con–
t i nua t i on des troubles, à l'appel des hommes de la réserve de la région de Trébi–
zonde.
Des patrouilles devaient circuler incessamment dans les rues et des détachements
devaient stationner à proximité des Consulats.
Mes Collègues se déclarèrent satisfaits et p r i r e n t congé du Gouverneur général.
Je crus à ce momen t devoir attirer l'attention de Gadri Bey sur la situation des éta–
blissements religieux français q u i étaient appelés, comme le prouvaient les précédents
de la ve i l l e , à devenir des lieux de refuge p ou r les Chrétiens d u voisinage; j e récla–
ma i p ou r eux une pr o t e c t i on particulière et le d r o i t de se couvrir de notre drapeau.
L e Va l i , en me répondant sur sa personne de la sécurité de nos protégés, se déclara
prêt à étendre à eux, comme j e le demandais, les mesures adoptées p ou r la garde des
maisons consulaires. C'est sur cette assurance f orme l l e que j e qu i t t a i le Gouverneur
général.
Mes renseignements personnels, en ce q u i concerne le récit des événements, d i f –
fèrent sur beaucoup de points de la version officielle. S i le succès de l ' i n t e r ven t i on
d u Va l i est conforme au récit de Cadr i Bey, i l n'en est pas de même quant aux causes
de l'incident. Mes Collègues et m o i nous savons, d'une source cer ta ine , que l'agres–
sion était préméditée. Différents détails le pr ouvent d'ailleurs évidemment. Les h a –
bitants des village^ rencontrés par Cad r i Bey venaient, p o u r u n g r and n omb r e , de
localités éloignées de plus de c i nq heures de marche de Trébizonde. Commen t l'avis,
d'ailleurs sans f ondemen t , d'une attaque des Arméniens a u r a i t - i l p u l eur parvenir
une demi-heure à peine après les débuts d u soulèvement ? I l est à présent établi que
des dispositions étaient prises par les meneur s , dès la f i n de la journée. Les mar –
chands d'armes d u vieux bazar avaient p u , b i en avant le soir, se débarrasser au
meilleur compte de l eur stock de revolvers et de fusils : on m'assure que des r e v o l –
vers sans grande valeur ont été payées jusqu'à c i nq livres turques. D ' u n autre c ô t é , les
émeutiers on t v o u l u , b i en avant de commencer l eur a c t i on , s'emparer d ' un dépôt
d'armes de l'Etat. On savait donc à quo i s'en t e n i r ; aussi est-on obligé, t o u t en r e c on –
naissant les efforts de Cadri Bey, de signaler les défaillances de l'autorité dans ces
Fonds A.R.A.M