gation d u catholicos tiendra à mettre ses
actes d'accord avec ses discours ; et s ' i l
succombe, le juge P a r k e r , hostile à toute
autre intervention est en parfaite c ommu –
nion d'idées avec l u i sur u n point capital :
i l n'admet pas qu'en a ucun pays des
hommes qu i ont acquis le droit de cité
a m é r i c a i n e soient aucunement mo l e s t é s et
si H a m i d s'obstine à ne pas r e c o n n a î t r e les
naturalisations d ' A r mé n i e n s , le candidat
du parti d é m o c r a t e prendra à son é g a r d
les m ê m e s mesures que le candidat du
parti r é p u b l i c a i n .
Mais si proche que soit l'élection p r é s i –
dentielle amé r i c a i n e , c'est encore u n trop
l o n g délai p o u r i n l e r v e n i r ; e t m a l g r é toutes
les apparences contraires, nous voulons
croire encore que les puissances de l ' E u –
rope occidentale auront avant le 6 novem–
bre, mis u n terme, une fois pou r toutes, à
l'effusion du sang dans les vilayets a r m é –
niens.
P i e r r e
Q
U I L L A R D .
UN APERÇU HISTORIQUE
' . ,
i
l
É E
.
L À
Question Arménienne
Nous sommes heureux de pouvoir publier
aujourd'hui la traduction de la remarquable
notice que M . H . - N . Brailsford a bien voulu
écrire pour le recueil consacré à la Conférence
internationale, tenue le
29
juin à Londres :
Les derniers é v é n eme n t s d ' Armé n i e
sont une si fidèle répétition du passé,
unesi exacte reproduction des p r emi è r e s
pé r i ode s , de ces vieilles atrocités sur la
m ê m e scène sanglante avec les même s
i n f âme s acteurs, qu ' i l peut être bon de
nous r emémo r e r , par un bref r é s umé ,
sans commentaires n i épithètes, les
c on s é qu e n c e s qu i suivront si l'Europe
s'abstient d'intervenir.
P a rmi les races sujettes de l'empire
turc, i l n'en est pas à qui sa situation
désespérée donne plus q u ' à la race ar–
mé n i e n n e le droit de faire appel aux
sympathies de l ' Europe . Divisée entre
la Perse, le Caucase russe et la T u r –
quie d'Asie, elle ne forme que dans
deux ou trois districts la majorité c om–
pacte de la population. A u nombre de
trois mi l l i on s d ' âme s dans l'empire
turc, elle est r é p a n d u e entre la Mer
Noire, à T r é b i z o n d e , j u s q u ' à la Médi–
t e r r a n é e , à Alexandrette, et presque
partout en nombre inférieur aux Tu r c s
dans les villes et aux Kurdes dans les
districts ruraux : mais i l n'est pas dou–
teux que par des remaniements, des
divisions administratives, elle aurait la
ma j o r i t é dans deux r ég i on s au moins
(1).
Elle n'a pas pour elle, comme pour la
Gr è c e , la puissance des souvenirs his–
toriques et sentimentaux; elle ne peut
pas comme les Bulgares faire appel à
une affinité de race .avec la Rus s i e ; et
appartenant à l'Eglise g r é g o r i e n n e , elle
ne peut invoquer ni la protection ca–
tholique n i la protection orthodoxe.
Elle n'a d'histoire que les souvenirs de
l'oppression et d'idéal ^que la fidélité à
son église persécutée.
Tand i s que les classes dirigeantes
sont en Tu r qu i e d'Asie une race c om–
me r ç a n t e , la masse de la nation est for–
mé e de bergers, de cultivateurs et
d'artisans qu i vivent, pour la plupart,
dans des'huttes souterraines, .plongés
dans une p a uv r e t é qu i n'a pas d'analo–
gue hors de Tu r q u i e . Les paysans dans
les districts de l'Est sont les serfs et les
vassaux des Kurdes, c o n d amn é s à tra–
vailler à leur profit et soumis sans
espoir de revanche ou de r é p a r a t i o n s à
leur rapacité, à leurs vices, à leurs ca–
prices.
Leu r situation était à peine connue
en Europe avant les massacres de
1894-
1896
et i l est cependant assez p r o u v é
que cette orgie de fanatisme et de
c r u a u t é n'a été qu'une aggravation de
leur état no rma l . Quand , pendant la
guerre de Cr imé e , la Russie envahit
l ' Armé n i e , elle fut repoussée par la
brillante défense de Ka r s , faite par le
général anglais W i l l i a m s . Le général
W i l l i a m s écrivait au sujet de l'admi–
nistration turque, telle q u ' i l l'avait vue
en A rmé n i e , que c'était « un instrument
de tyrannie peu t - ê t r e inégalé dans le
monde », tandis que touchant la police
turque i l disait : « Au c u n langage ne
peut rendre l'infamie qu i caractérise la
vie et le caractère de cette espèce
d'hommes. Les scènes de leurs exploits
ont lieu en général dans les villages et
plus s pé c i a l emen t dans ceux qu i sont
hab i t é s par des c h r é t i e n s . » A la g é n é r a –
tion suivante, quand la Russie envahit
de nouveau ces provinces, les même s
massacres avaient lieu en A r mé n i e
qu'en Bulgarie. T r o i s ans auparavant,
le patriarche Nersès avait p r é s en t é une
j - c r m i i
1
,
i notez ,àlr>y{-ô[binèY Â .za'ioe;
(1)
D a n s la grande A r m é n i e (ancien eyalet d'Erze–
r o u m , eyalet d ' E r m e n i s t a n , anciens vilayets d ' E r z e –
r o u m , V a n , H e k k i a r i et M o u s h ) , et en C i l i c i e (ré–
gion de S i s , H a d j i n , Z e ï t o u n ) .
pétition à la Porte, dans laquelle i l
donnait des détails sur l'accaparement
par les beys turcs et kurdes des champs
appartenant à
258
villages,
3
villes et
42
couvents a r mé n i e n s . Les rapports
consulaires abondent en détails sur la
tyrannie exercée pendant ces a n n é e s .
En
1882,
par exemple, les ambassa–
deurs durent protester parce que dans
un seul district les Kurdes avaient con –
verti par la force deux mille hommes
à l'Islam. Les massacres n'ont été que
le point c u lmi n a n t de siècles d'oppres–
sion.
C'est vers
1890
que le gouvernement
turc, en dehors des Tu r c s et Kurdes
locaux, c omme n ç a pour sa part à or–
ganiser ces violences. Les A r mé n i e n s
n'avaient pas d'aspirations politiques;
et les Tu r c s s'accomodaient de les em–
ployer comme secrétaires, espions et
fonctionnaires i n f é r i e u r s .
Mais en
1890,
trois changements i m –
portants se produisirent.
i° Le Sultan s ' éma n c i p a de l'influence
anglaise qu i avait été emp l oy é e dans
une faible mesure à secourir les c h r é –
tiens d'Asie Mi neu r e et conclut une en–
tente avec la Russie.
2
0
Le Sultan c omm e n ç a à assumer,
plus qu'auparavant le gouvernement
direct de l'empire. Ses ministres devin–
rent des hommes de paille et ses con –
seillers réels furent des favoris du
Palais qui e n c o u r a g è r e n t ses tendances
au panislamisme, c'est-à-dire à l'affir–
mation de son a u t o r i t é t h é o c r a t i q u e ,
imp l i quan t la p e r s é c u t i on des c h r é t i e n s
i nd i gène s et la défiance de l ' Europe .
3
°
Les A r mé n i e n s e u x -même s s'étaient
ralliés r é c emme n t autour du
Hntchak,
société politique secrète, issue de jour–
naux fondés en Europe huit ans aupa–
ravant. Il n'est pas à supposer que
cette Société p r ê c h â t la rébellion ou–
verte ou pen s â t à provoquer l'autono–
mie ou l ' i n d é p e n d a n c e de l ' Armé n i e .
Son programme se l i m i t a i t à la demande
de r é f o rme s administratives et son ac–
tivité dans la mesure où elle était cri–
minelle consistait à assassiner non des
Tu r c s , mais des espions et des traîtres
a r mé n i e n s .
JOVIÏ
ztnorn ziual
Le premier s ymp t ôm e du nouveau
r é g ime fut l'organisation des tribus
kurdes sous forme de la célèbre cava–
lerie Ham i d i é . Les Kurdes étaient aussi
brutaux et i nd i s c i p l i né s qu'auparavant,
mais d é s o rma i s ils exerçaient leurs
exactions et d é p r é d a t i o n s sous le patro-
Fonds A.R.A.M