Les Macédoniens bulgares ont, d u - d é b u t de
l'application de cette réforme, fait preuve du
plus grand empressement à se faire enrôler et
dans le service de la gendarmerie et dans celui
des gardes-champêtres. Si, plus tard, ils se sont
trouvés dans la nécessité de s'en abstenir, les
causes en sont d'un tout autre ordre : ce sont
d'une part, l'opposition à main armée, la per–
sécution et les menaces de mort, souvent sui–
vies d'exécution, que la plus grande partie de
Bulgares, déjà engagés à ces services, ou les
membres de leurs familles et de leurs com–
munes ont eu à éprouver de la part de l'élément
musulman; c'est encore, d'une autre part, le
traitement insupportable adopté à leur égard
par leurs chefs musulmans, qui les a poussés
à ne pas vouloir s'engager dans les services
dont il s'agit. Ainsi, au lieu de les laisser dans
les localités de leur habitation ou de leur nais–
sance, on les envoie, en guise d'exil, dans des
centres non bulgares et hostiles à leur nationa–
lité. Dans certaines localités on ne permet pas
même aux gardes-champêtres de porter des
armes, qui, dépourvus de la sorte de tous
moyens de défense personnelle, sont à la merci
de leurs agresseurs.
Quelques faits précis qui se sont produits
dans ces derniers temps, éclaireront amplement
la situation :
1.
Le gendarme Nicolas Tsevtsovsky, de Kra-
tovo, vilayet d'Uskub, chargé d'escorter un pri–
sonnier turc, a été assassiné à proximité de
cette localité par trois soldats ottomans, qui dé–
tachèrent ensuite les fers du prisonnier et le lais–
sèrent en liberté. Témoins de ce drame : les
nommés Kreste et son fils Tswetco, courriers à
Koumanovo. La victime laisse une veuve et
trois enfants en bas âge dans la plus extrême
indigence ;
2.
Sanko Antoff et Bojil Velitchcoff, gen–
darmes à Koumanovo, menacés de mort à
maintes reprises par des soldats, ont dû s'enfuir
en Serbie pour sauvegarder leur vie ;
3.
Stoyan Maneff, fils du garde-champêtre du
village Arjianitchevo, sandjak d'Uskub, assas–
siné par l'ancien garde musulman Chaban A l i ;
4.
Le garde bulgare du village Dolno Lissit-
cheé même sandjak, malmené brutalement par
son compétiteur musulman, Alit, et menacé de
mort s'il ne démissionnait pas ;
5.
Dans les derniers temps, quelques assassi–
nats ont été commis par des Albanais dans des
localités sises à proximité de Salonique en vue
d'en obliger les habitants d'engager des gardes-
champêtres albanais ;
6.
Le nommé Christo, notable du village Ne-
vokazi, kaza de Lerin, vilayet de Monastir, as–
sassiné dans son moulin, situé à une centaine
de mètres de ce village pour avoir pris part au
choix des gardes-champêtres chrétiens pour sa
commune ;
7.
Le.maire du village Nevoliani, mêmes kaza
et vilayet, assassiné par un groupe de quarante
musulmans pour le même motif que ci-dessus.
Deux autres habitants du même village ont été
à la même occasion victimes du fanatisme mu–
sulman : l'un a été également assassiné et l'autre
très grièvement blessé ;
8.
Un détachement de cinquante-soixante
soldats, arrivé au village Molino, kaza de Kou–
manovo, vilayet d'Uskub, semit, par simple plai–
sir, à maltraiter et à battre son garde-cham–
pêtre, de nationalité bulgare. Celui-ci, effrayé,
prit la fuite et aucun Bulgare ne veut plus se
charger de ces fonctions ;
9.
Dans le kaza d'Uskub, le plus grand
nombre des villages appartiennent à des beys,
quoique habités exclusivement par des Bulgares.
Ceux-ci exploitent les terrains de ces villages
sous le régime du métayage. Or, les Beys inté–
ressés opposent la plus grande résistance à la
nomination des gardes-champêtres chrétiens
dans ces villages. De son côté, l'autorité, im–
puissante de s'imposera ces Beys, se venge sur
les malheureux villageois en leur attribuant
tous les torts de son insuccès. C'est ainsi que
les maires des villages Radichani, Bendek,
Vodno, Tseressovo, Moralino, Vizdegovo, Ber-
dowtzi, Novo-Selo, etc., ont été. emprisonnés
sous le prétexte de n'avoir pu contribuer à la
nomination des gardes dont il s'agit dans leurs
communes respectives.
8
février
1904.
Tout le monde connaît les excès
et atrocités dont s'étaient rendus coupables les
ilavés,
appelés l'été dernier sous les armes. La
plupart de ces ilavés appartiennent, dans le
vilayet de Kossovo, à la race albanaise. Leur
esprit d'insubordination, leur licence effrénée
ainsi que la férocité de leurs instincts sont no–
toires. Aussi bien, est-ce à leur action néfaste
qu'est dû l'état actuel de détresse des milliers
de familles chrétiennes, privées de leur gîtes
détruits par le feu, de leurs parents et soutiens
assassinés, enfin déshonorées et dévalisées . . .
Les deux puissances réformatrices et le Gou–
vernement Ottoman lui-même ont reconnu la
nécessité absolue de procéder sans retard au
licenciement de ces troupes indisciplinées et
inaptes, de par leur nature, à former des soldats
du devoir. Une cause spéciale a été prévue à
cet effet dans le plan des réformes de Murzsteg,
et le Gouvernement Ottoman n'avait pas hésité
à ordonner leur licenciement et leur envoi
immédiat dans leurs foyers. De graves incidents
s'étaient même produits lors de la mise à exé–
cution de cette mesure. On a eu peine à leur
faire déposer les armes qu'ils n'ont consenti à
remettre aux autorités qu'après leur retour à
domicile. A cette occasion plus de trois mille
fusils avaient disparu et il est avéré que ces
armes, quoique retrouvées ensuite, ont été
laissées et restent entre les mains de la popula–
tion albanaise.
Or, malgré tous ces précédents pitoyables, le
Gouvernement Ottoman tend actuellement à dé–
roger à ses engagements vis-à-vis des puissances
réformatrices en ce qui regarde les
ilavés
dont
il sagit. Sous prétexte de réorganisation de ses
cadres de réserves, il vient de faire créer un
corps de
rédifs de deuxième catégorie,
qui est
une seconde édition du corps même des ilavés
ave-c les mêmes hommes mais sous une nouvelle
dénonciation et sous un nouvel uniforme, celui
des rédifs. Former de ces rebelles, sous quelque
dénomination et uniforme que ce fût, des soldats
diciplinés et honnêtes, est une chimère. Leur
réintégration dans l'armée ne pourra ayolr d?au-
tre effet que de répandre de nouveau le deuil,
le déshonneur et la détresse au sein de la popu-
tion chrétienne, déjà si cruellement éprouvée.
Il est donc du devoir des puissances réformatri–
ces de prévenir tous ces malheurs, d'autant plus
que l'effectif actuel de l'armée ottomane est plus
que suffisant pour parer à cette éventualité . . .
Lettre de Salonique.
.
4
février
1904.
Le tribunal de Salonique a pro–
noncé l'autre jour un verdict d'acquittement en
faveur des frères Souroudjieff, négociants en
cette ville, et de leur deux domestiques, pour–
suivis pour l'affaire des bombes trouvées dans
leur comptoir. Le tribunal n'a pu établir qui y
avait mis ces bombes. 11 n'a pas non plus voulu
interroger la personne qui avait dénoncé ce fait
à la police. Il est manifeste que c'était là une
affaire montée par la police même.
La prison " Yédi-Koulé " en cette ville est
destinée à contenir
5
oo
personnes, Le nombre
des détenus -y- monte actuellement à
i3oo.
A cause de la malpropreté et de l'étroitesse de
l'édifice, la mortalité y a atteint des chiffres
invraisemblables. II y a eu souvent deux décès
par jour. Depuis deux mois i l y a eu
37
Bulgares
morts sans compter les décédés des autres
nationalités.
Dans les cercles ottomans on persiste à affir–
mer que les autorités locales en Macédoine y
auraient fait reconstruire plus de
5
ooo
maisons
dans les villages incendiés l'été dernier. On
informe du village Zagoritchani, kaza de Kos-
tour, que la Commission y arrivée au susdit
effet distribua à chaque famille de
60
à
i 5 o
piastres ce qui a suffi à peine pour s'acheter
de quoi manger pendant quelques jours. A u –
cune maison n'y aurait été reconstruite. l i e n
est de même dans tout le vilayet de Salonique.
Les Prisons d'Andrinople.
L I S T E d e s B u l g a r e s e n f e r m é s d a n s l e s p r i s o n s d ' A n d r i n o p l e , c o n d a m n é s
s o m m a i r e m e n t p a r le t r i b u n a l s p é c i a l (civil).
.
NOMS ET PRÉNOMS
NATIFS ItB
C o û t a i s à
O B S E R V A »
212.
Vassil Danaïloff
Vil. de Raikovo
3
—
Maître d ' é -
(
arr. de Pacha-
cole.
Tchélébib).
213.
Chr. Norton*
V i l l . d'Oustovo.
5 —
214.
Chr. Stichkoff
lu — Maître d'école.
215.
D. Karamandjoukoff. Vil. de Tchok-
5 —
manpvo.
216.
leVàtiW *—
6 —
217.
Jordan Tchilinghiroff Village. d'Alas-
3 —
hideré.
218.
F. Natcheff
—
5
219.
Todo Gavriloff
Vil. de Totevo.
11 - -
220.
Nasso Todopobi
—
11 —
221.
T. Marcheff
—
12 —
222.
T. Staeff
—
12 —
223.
V. Taveff
—-
9 —
Prêtre.
Fonds A.R.A.M