sur toutes les provinces habitées par
des Arméniens.
Nous avons annoncé en son temps
le meurtre de Chérif agha de Ko t a n ,
et l'arrestation de trente Arméniens de
Mo gh o unk , qu i sont allés r e j o i ndr e
dans les pr i sons de Mo u s h cent c i n –
quante de leurs compatriotes. Dès le
mo i s de j u i n , l ' un de ces ma l heu r eux ,
Hasrat, était mo r t des tortures subies
au cours des perquisitions. De pu i s
cette date, sept autres pr i s onn i e r s sont
mo r t s .
Quant au village même de M o –
ghounk , i l a été attaqué à l a fin de
j u i l l e t pa r les Ku r d e s Ma hmo u d d ' Os –
ma n , Selo de F i a l k h i , Ma hma h d de
Chm l a k et Misto ; en l'absence de l a
p l upa r t des homme s valides, qu i ont
été jetés en p r i s on après le meurtre de
Chériff agha, les bandits n'ont pas
trouvé de résistance; i l s ont donc à
leur aise pillé le village, réduit en c en –
dres l'église et les ma i sons et brûlé
toute l a récolte, env i r on mi l l e hecto–
litres de blé. Le s habitants se sont dis–
persés, et les femmes et les enfants des
pr i s onn i e r s sont venus à Mo u s h m e n –
dier u n peu de pa i n . L e lamentable
troupeau a été chassé p a r l e s autorités
de Mo u s h et erre à l'aventure dans l a
campagne.
Pendan t le mo i s d'août, le nomb r e
des assassinats s'est élevé à cent c i n –
quante : des Arméniens seuls ont été
emprisonnés sous le prétexte extrava–
gant qu'ils se déguisent en Ku r d e s
p ou r tuer leurs compatriotes et nu i r e
au b o n r enom du gouvernement de Sa
Majesté bami d i enne .
Ma i s , sans énumérer les meurtres
i nd i v i due l s c ommi s en j u i l l e t , i l i m –
porte de faire connaître l'affaire de
Ma r n i k , déjà signalée par des dépêches
de Tiflis et de Recht .
Ma r n i k est u n village de cinquante
familles, soit env i r on trois cent c i n –
quante personnes, à trois heures de
Mo u s h .
I l y a quatre ans, le T u r c Fe t ou l l ah
Muftizadé s'est emparé de toutes les
terres du village occupées par les A r –
méniens; on sait que pour la seule région
de Mo u s h - B i t l i s , le rapport du prêtre
Papghen énumère plus de vingt v i l –
lages arméniens entièrement spoliés
pa r des chefs turcs ou kur de s .
Se l on l'habitude, Fe t ou l l ah Muftizadé
a installé c omme serfs sur leurs a n –
ciennes terres les Arméniens dépossé–
dés, qu i en sont réduits à travailler
durement p o u r le profit de l ' u s u r p a –
teur.
Moyennan t quo i i l les protège à peu
près c omme i l le ferait p ou r ses bœufs
et ses moutons. Ma i s les Ku r d e s B a k -
r a n l i ne permettent pas que les Armé–
niens jouissent même de cette appa –
rence de tranquillité.
A l ' aut omne de rn i e r , i l s ont tué
Va r t an et O h a n ; le 6 ma i de cette a n –
née, i l s ont tué Gha r z o Kh a t c h o y a n et
Sarkis Ha r o y an ; le 4 ma i , i l s avaient
déjà blessé deux paysans q u i eurent,
l ' imp rudenc e d'aller se p l a i nd r e à
Mo u s h et furent aussitôt emprisonnés.
E n f i n , le 14 juillet, I b r a h i m , neveu du
célèbre b r i gand Ku r d e K h a l i l , à l a tête
d'une centaine d ' hommes , a attaqué le
v i l l age . Le s femmes et les enfants purent
s'enfuir et le bétail fut mi s hors d'at–
teinte. Le s K u r d e s , irrités de v o i r
leur échapper a i n s i une partie de l eur
pr o i e , tuèrent les notables Mo u r a d
M i r o y a n , Ghaza r Ghouguéyan, Ga -
r abed Mg r e y an , Kévork
S r k o y a n ,
Gagoy, Gha z a r i an , Simé Ch a r o y a n .
Bagdé Mg r e yan et une f emme , Béhar,
ont été grièvement blessés. Tous les
habitants du village se sont dispersés
et errent misérablement dans les v i l –
lages voisins.
Mais ce n'est pas seulement à Mo u s h
et dans les environs, c'est partout où
résident des Arméniens que s'exercent
les cruautés hami d i enne s .
A Seert, au c ommenc ement de j u i n ,
une caravane de c i nquant e personnes
est attaquée pa r les Ku r d e s ; les Armé –
niens seuls sont dévalisés.
A Seert encore, 29 j u i n , les nommé s
Hassan et Cheno enlèvent de concert
Hamché, femme de Hagop Cha r r o de
B i me r : la femme est attribuée à Ha s –
s a n ; son c ompagnon à titre de d é d om–
magement enlève l a f emme de D a -
houd Gha z a r , du même village. Le s
deux bandits se distraient en outre à
quelques assassinats et blessent griè–
vement Ghesso Bedrossian du village
de Khochéna.
A P a l o u , vilayet de Diarbékir, les
chefs kurdes s'emparent des terres d u
couvent de Kahl/.rahagatz; p ou r légi–
t ime r l ' usur pa t i on , le fisc inscrit ces
c i nquant e - c i nq hectares c omme ayant
été acquis au p r i x de 27 piastres, soit
5
f r . 50 l'hectare.
A l b i c h , dans le vilayet de Mamo u r e t
u l A z i z , sandjak de Ma l a t i a , caza de
K i a h d a , est u n village habité pa r
soixante-douze familles arméniennes ;
Ma hmo u d agha Bekirzadé et Ma hmo u d
agha Bo ybe g l'attaquent, avec leurs
bandes, le 6 j u i n , au coucher du soleil.
Le s Arméniens se retirèrent au village
de Ke f e r d i c h , après av o i r p e r du quatre
homme s et une f emme tués par l a f u –
sillade. L'église et l'école furent pillées,
les maisons démolies, et les matériaux
utilisables transportés à V a n k o u g p ou r
la construction de l a ma i s on du m u -
d i r . Le s blessés qu i tombèrent aux
ma i n s des Ku r d e s furent mi s en m o r –
ceaux. Quelques jours après une atta–
que sur Ke f e r d i c h fut repoussée pa r les
habitants ; mais ceux - c i avertirent les
réfugiés q u ' i l leur fallait quitter le v i l –
lage.
A i n s i partout et toujours, meurtres,
pillages, viols, éviction v i o l ent e des
Arméniens.
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L e 15 no v emb r e p r o c ha i n , M M . Gu s –
tave Rouane t et Ma r c e l Sembat i n t e r –
pelleront le gouvernement français sur
les massacres arméniens et l a rup t ur e
d i p l oma t i que avec l a Tu r q u i e et sans
doute l ' i n t e rpe l l a t i on de M . Deny s Co –
c h i n sera discutée à l a même date.
Si les hécatombes grandioses que le
Sultan méditait de faire au Sassoun
ont été ajournées,
létal normal
en A r –
ménie demeure intolérable; c'est l a
mo r t lente au l i eu de l ' e x t e rmi na t i on
brusque. On ne saurait se contenter
de réponses évasives n i laisser allé–
guer que les faits révélés constituent
des actes de brigandage isolés : c om –
b i en de cadavres faut-il donc p ou r
qu ' une tuerie soit p r omu e au r ang plus
éminent de massac re? De quelles
preuves nouvelles a-t-on beso in e n –
core p ou r être certain que c'est à Con s –
tantinople même que le p l an d'égor-
Fonds A.R.A.M