faveur du peuple arménien, odieusement op–
primé, auquel le Congrès adresse l'assu–
rance de son étroite et ardente solidarité.
Par le vote de cette résolution le Con–
grès de l a Démocratie Socialiste Interna–
tionale a donné mandat formel aux grou–
pes socialistes parlementaires de France,
d'Allemagne, d'Autriche, d'Italie, d ' An –
gleterre, de Belgique, de Hollande, de
Danemark, d'intervenir énergiquement
en faveur des victimes du Sultan Rouge.
Nous espérons qu'ils ne l'oublieront pas.
A u Congrès des Etudiants et anciens
Etudiants socialistes, ce fut un jeune étu–
diant bulgare, Pierre Staneff, délégué des
Etudiants socialistes de Sofia, qui fit vo–
ter une motion énergique flétrissant l a
complicité des grandes puissances avec
Abd-ul-Hamid.
De même aussi le Congrès ;le l'Huma–
nité, après avoir entendu le rapport de
M . Arakelian, fut unanime à « flétrir et
condamner les actes de férocité et de bar–
barie » accomplis en Turquie et a de–
mandé que « ceux qui ont l a conscience
de l'humanité agissent pour mettre fin
à ces crimes contre l'humanité ».
Enfin, à l a Conférence de l a Presse So–
cialiste, notre ami P . Quillard présenta un
rapport très documenté sur l a question,
dont nous voudrions indiquer i c i , si l a
place ne nous faisait défaut, les données
générales. Nous nous bornerons à dire
que les conclusions en furent adoptées,
sans contestation aucune, par l a Confé–
rence .
JEAN LONGUET.
NOUVELLES D'ORIENT
ARRESTATION A CONSTANTINOPLE.
Le
ministre de la police Chefki-bey redouble
de zèle : i l invente complots sur complots.
Depuis le i 5 septembre, plus de quatre
cents Armén i en s ont été arrêtés sous des
motifs absurdes, notamment sous le pré–
texte de connaître l a retraite d'un « dan–
gereux révolutionnaire » Zaré Kotchian
qui réside à Athènes et s'est présenté là
au ministre ottoman.
Pa rmi les personnes arrêtées se trou–
vent un touriste russe, Kazakoff, qui est
détenu au consulat de Russie et Al exan
Arzouian, citoyen américain. L'arresta–
tion d'Alexan Arzouian, qu i était venu
paisiblement à Constantinople avec sa
fiancée, est contraire aux capitulations :
la légation américaine exigera certaine–
ment sa mise en liberté. Le consulat de
France a commis l a faute grave de laisser
perquisitionner chez la fiancée,
française,
d'Alexan Arzouian.
A l'occasion de l a venue du Shah de
Perse, plusieurs centaines de Persans ont
été également arrêtés, ainsi que des ulé–
mas et nombre de jeunes turcs.
E n outre, un grand nombre de Grecs
ont été incarcérés comme appartenant à
1' «
E t hn i kê Hétairia » et le 3
1
octobre un
grand nombre de Bulgares, de Constanti–
nople, comme appartenant au comité ma–
cédonien.
Selon une information du
Mechveret,
on fait disparaître beaucoup de prison–
niers par noyades nocturnes dans la Mar–
mara : le Bosphore indiscret rendait les
cadavres. A i n s i se justifie la parole d'un
poète turc contemporain « que l a géné–
reuse sollicitude du Sultan pourvoit
même à la nourriture des poissons ».
E N ARMÉNIE.
L e s Kurdes ont brûlé
le couvent de Bo r près de Bitlis.
L A SITUATION EN MACÉDOINE.
Les
massacres d ' Armén i en s ne suffisent pas
au Sultan : i l p r é p a r e aussi des tueries
en Macédoine; comme mesures prélimi–
naires i l empoisonne en masse les insti–
tuteurs et les soumet aux pires supplices.
E n même temps, ses journaux officieux,
à Paris et ailleurs, annoncent qu'il «
suf–
fira d'un persévérant effort de vigueur et
de justice pour anéantir tous ces foyers
d'intrigues qui enlèvent tout repos à la
province
».
On sait ce que veut dire « réta–
blir l'ordre » dans le langage hamidien.
E n attendant, comme les Kurdes et
Tcherkesses en Armé n i e , on lâche les
Arnautes en Macédoine. Vo i c i le bilan des
dernières semaines :
i5 octobre. — Assassinat du cavas Bu l –
gare de Dojeaj. — V i o l d'une jeune fille à
Sabistcha. — Massacre de d i x Bulgares
par l a bande d'Islam Tchaouch Goranez.
28
octobre, — Attaque et pillage du v i l –
lage d'Eklovets par Islam Tchaouch et son
camaradeRom-Douco; intervention appa–
rente de la gendarmerie, inoffensive pour
les agresseurs; descente nouvelle d'Islam
Tchaouch à Gradechnitza ;
treize paysans
hachés
par son ordre dans le village
même.
3
o octobre. — Attaque du village de
Sefze (Prizrend) par seize Albanais; mas–
sacre de la plupart des habitants.
8
novembre. — A Lucksha Reha (Nbvr-
Bazar) enlèvement de la fille de Vujicsin
par Osman Gyekits; conversion forcée à
l'islam. Tentative analogue au village de
Kolaschin,'repoussée par les habitants.
Selon la coutume, les victimes sont ren–
dues responsables des excès dont elles
souffrent. Des brigands ottomans du v i l –
lage d'Andrinople ayant enlevé le docteur
Kéramitchoglou, ce fut une excellente oc–
casion pour a r r ê t e r une centaine de Bu l –
gares et les torturer dans leur prison.
Quarante-cinq d'entre eux ont été envoyés
en exil à Saint-Jean-d'Acre, dont sept ins–
tituteurs; six sont expédiés à Sinope pour
une période de six à sept ans.
Les journaux européens qui mè n e n t si
grand bruit autour du procès de Bucarest
(
assassinat de deux espions turcs, soi-
disant par ordre du haut comité macédo–
nien) se gardent soigneusement de relater
ces faits que nous empruntons en partie
à l'excellent journal macédonien
Y Effort.
MANDATS D'AMENER.
L a situation des
personnes qui déplaisent au Sultan est
singulièrement délicate : rester en Tur–
quie, c'est pour elles risquer l a mort ou
la prison; s'exiler volontairement, c'est
offenser gravement leur magnanime sou–
verain. — Celui-ci les fait juger par con–
tumace et condamner à mort. Relevons
dans l a liste de ceux qu i se trouvent ainsi
sous le coup d'un mandat d'amener :
Abdurrhaman-bey fait des démarches à
Londres pour la publication d'une feuille
subversive;
Ismaïl Kemal-bey, Nemi r i effendi, à
Paris, même motif;
Akrseraïjli Nou r i Ahmed, Nazmide Phi-
lipoppoli, à Londres, même motif;
Nedjib-effendi, au Caire même motif;
Mehmed-bey, fuite en Europe par suite
d ' « idées révolutionnaires. »
L'un des secrétaires de Damad Mah–
moud Pacha, le professeur Daniche-bey,
qui s'était signalé à Paris par les propos
les plus violents contre Abd-ul-Hamid, a
eu la lâcheté de rentrer à Constantinople :
un vendu de plus parmi les faux réforma–
teurs.
DÉCORATIONS OTTOMANES ET FLAGORNE–
RIES EUROPÉENNES.
Chaque fois qu'un
Eu r op é e n se trouve lésé, le Sultan décore
un personnage important de sa nation.
Deux exemples pour ne pas parler de
M . Paul Deschanel :
Tentative d'assassinat du drogman du
consulat autrichien : le consul général von
Janko reçoit le grand cordon du Medji-
dié.
Tentative d'assassinat du gérant du
consulat russe d'Erzeroum par une bande
de Kurdes : M . Zniowief, ambassadeur
de Russie à Constantinople, reçoit l'Ifti-
khar en brillants.
Les simples mortels suivent l'exemple
des grands : M . Achille Segard, conféren–
cier envoyé par l'Alliance française à
Constantinople, s'est cru obligé d'adresser
«
un salut respectueux à S. M . I. le Sultan. »
M . A . Segard est un galant homme de
beaucoup d'esprit et de talent : i l n'était
point tenu de saluer, même du bout des
lèvres, un assassin.
P . Q.
Le Secrétaire-Gérant :
JEAN LONGUET.
3435.—
IMPRIMERIE DE SURESNES ( G .
Richard, act")
9,
rue du Pont
Fonds A.R.A.M