Palais par dépêche que si leurs appointe–
        
        
          ments a r r i é r é s ne leur étaient pas payés au
        
        
          plus vite ils quitteraient le service de Sa
        
        
          Majesté et se feraient Jeunes Turcs. Mu -
        
        
          hiddin bey, premier secrétaire, allait jus–
        
        
          qu'à vouloir organiser une grève générale
        
        
          des ambassades et légations après entente
        
        
          préalable. Ce projet grandiose a été écarté,
        
        
          i l sera repris peut-être. .
        
        
          Sans doute ces jeunes diplomates
        
        
          n'agissent pas en vertu de motifs
        
        
          désintéressés et i l suffira de quelques cen–
        
        
          taines de livres pour que leurs scrupules
        
        
          s'évanouissent. Ma i s i l est assez naturel
        
        
          qu'ils se plaignent de voir leurs bonnes
        
        
          dispositions mal récompensées, alors que
        
        
          leur chef Mu n i r bey touche régulièrement
        
        
          sa finance et qu 'Hami d envoie t r è s régu.
        
        
          ment aussi l a provende allouée aux « étu–
        
        
          diants ottomans » de Paris, c'est-à-dire
        
        
          aux adroits ga r çon s qui affectaient à
        
        
          Constantinople des idées subversives et
        
        
          que les libéralités du sultan entretiennent
        
        
          ici en une pieuse fainéantise ; les véri–
        
        
          tables étudiants ottomans ne participent
        
        
          pas aux faveurs impériales et seraient
        
        
          aussitôt app r éhendé s au corps, s'ils se
        
        
          hasardaient à rentrer dans leur pays.
        
        
          Comment Mun i r bey, réduit à ses seules
        
        
          forces, pourra-t-il suffira ses multiples be–
        
        
          sognes d'espionnage et d'achats de cons–
        
        
          ciences sur les marchés de Paris, de Berne
        
        
          et de Bruxelles ? L u i rcstera-t-il quelques
        
        
          heures pour ses rares plaisirs où se distrait
        
        
          son austérité presque ascétique ?
        
        
          
            T R É S O R V I D E .
          
        
        
          —
        
        
          L a commission extraor–
        
        
          dinaire des finances qu i siège à Tophani
        
        
          depuis tantôt un an n'a fait qu'accroître le
        
        
          gâchis. Elle a aisément constaté que le
        
        
          précédent ministre des finances, Reschad
        
        
          Pacha avait us é et abusé du système soi-
        
        
          disant aboli des
        
        
          
            navales,
          
        
        
          c'est-à-dire qu ' i l
        
        
          avait fait payer aux caisses des provinces
        
        
          les sommes dues par le trésor, non plus
        
        
          comme autrefois au moyen de délégations
        
        
          mais plus rapidement encore en transpor–
        
        
          tant à Constantinople les sommes déte–
        
        
          nues par les defterdars des vilayets. Elle
        
        
          a constaté de même que chez les savais,
        
        
          les
        
        
          
            sourets
          
        
        
          r ep r é s en t an t les sommes dues
        
        
          aux fonctionnaires étaient négociés non
        
        
          plus à cinquante mais à quinze pour cent
        
        
          de leur valeur, ce qu i indique une con–
        
        
          fiance peu commune dans l a solvabilité
        
        
          du trésor. Mais i l aurait fallu dire encore
        
        
          que les sommes détournées de leur affec–
        
        
          tation par Reschad étaient précisément
        
        
          versées à l a bande d'Izzet bey, c'est-à-
        
        
          dire à l'homme même qui contrôle les
        
        
          travaux de la commission.
        
        
          Le nouveau ministre Zuhdi Pacha, pré–
        
        
          cédemment n ommé à l'instruction pu–
        
        
          blique, vu son extrême ignorance, a t r ouvé
        
        
          en caisse l a somme de 2 0
        
        
          
            livres (vingt
          
        
        
          
            livres)
          
        
        
          turques. L a
        
        
          
            Gazette de Francfort
          
        
        
          se demande comment cet honn ê t e imbé–
        
        
          cile pourra se tirer d'affaire en une telle
        
        
          situation.
        
        
          
            A U T O U R
          
        
        
          
            D U P A L A I S .
          
        
        
          
            —
          
        
        
          Hamid, ainsi
        
        
          que le commun des hommes, coule des
        
        
          jours mélangés de joie et de souci. L ' a l –
        
        
          garade entre Izzet bey et Riza Pacha, mi –
        
        
          nistre de l a guerre, ne put que l u i ê t r e
        
        
          agréable. R i z a Pacha injuria violemment
        
        
          le favori pour les conseils donn é s dans
        
        
          l'affaire des postes et le mena ç a de son
        
        
          épée, s ' i l compromettait à nouveau la
        
        
          Turquie et le Padischah. Excellente a flaire:
        
        
          la discorde entre les domestique est pro–
        
        
          fitable au ma î t r e .
        
        
          Presque aussitôt une mauvaise nou–
        
        
          velle : un officier de l a garde a donné à
        
        
          son fils le nom de Mourad. Pour cette
        
        
          allusion ma l s é an t e àu frère captif de son
        
        
          frère, l a Bête a envoyé l'officier en exil.
        
        
          Autre mécompte : Redwan Pacha, pré–
        
        
          fet de la ville, veut démissionner. Ce res–
        
        
          pectable pirate se plaint du mauvais état
        
        
          des finances municipales et ne consenti–
        
        
          rait à rester que si on l u i donnait licence
        
        
          de « faire des réformes" » : au sens où i l
        
        
          entend le mot, i l faut comprendre qu ' i l
        
        
          désirerait augmenter ses pirateries. Ha–
        
        
          mi d l u i accordera tout pour peu que Red–
        
        
          wa n l u i donne une part sur les bénéfices.
        
        
          
            A R A R - C H É F I K .
          
        
        
          —
        
        
          Arab-Chéfik, ministre
        
        
          de l a police, vient d'être élevé à la dignité
        
        
          de vézir : lemenchour impérial relate ses
        
        
          nombreux services et célèbre son dévoue–
        
        
          ment et sa fidélité au trône ; selon le céré–
        
        
          monial d'usage, le ministre reçut à l a
        
        
          porte de son konak les envoyés du souve–
        
        
          rain et tandis que son père et son fils se–
        
        
          couaient des encensoirs, i l baisa pieuse–
        
        
          ment le document qui atteste son infamie;
        
        
          puis à l'intérieur lecture en fut donné e à l a
        
        
          nombreuse assistance.
        
        
          C'était dans l'espèce toute la fleur de l a
        
        
          police et de l a magistrature hamidienne à
        
        
          laquelle s'étaient joints, se rendant justice
        
        
          à eux-mêmes, les r ep r é s en t an t s de la presse
        
        
          turque, auxiliaires fidèles de Chéfik bey,
        
        
          ainsi que des journalistes « français »,
        
        
          bien vus à l'ambassade, et de très honora–
        
        
          bles Armé n i e n s , comme S. E . Zareh Die-
        
        
          ber Effendi, conseiller d'Etat.
        
        
          
            C O N D A M N A T I O N E T M A N D A T D ' A R R Ê T . —
          
        
        
          On l i t dans les journaux turcs :
        
        
          La cour criminelle a jugé par défaut le
        
        
          nommé Suleïman Memdouh, accusé de crime
        
        
          pour s'être sauvé à l'étranger dans des in–
        
        
          tentions séditieuses.
        
        
          Sa culpabilité ayant été établie, i l a été
        
        
          condamné à dix ans de détention dans une
        
        
          enceinte fortifiée, à la perte de ses droits ci–
        
        
          viques et à la confiscation de ses biens.
        
        
          —
        
        
          Une note émanant du procureur impérial
        
        
          près la cour d'appel correctionnelle porte que
        
        
          Mourad bey de Tiran, accusé de crime pour
        
        
          s'être sauvéàl'étrangerdeTripoli d'Afrique et
        
        
          avoir fait des publications séditieuses, étant
        
        
          rentré à Constantinophle et ayant dernière–
        
        
          ment obtenu l'amnistie impériale, le mandat
        
        
          d'arrêt lancé contre lui est devenu nul et non
        
        
          avenu. Mourad bey est actuellement admis
        
        
          au ministère des affaires étrangères.
        
        
          —
        
        
          A l i Nouri, consul général de Turquie à
        
        
          Rotterdam, n'ayantpu être arrêté, la cour cri–
        
        
          minelle lui accorde un délai de dix jours
        
        
          pour se présenter devant cette cour. Passé
        
        
          ce délai, i l sera jugé par défaut, ses biens
        
        
          seront confisqués et i l perdra ses droits ci–
        
        
          viques. Les autorités sont tenues de l'arrê–
        
        
          ter où elles le trouveront.
        
        
          Les deux dernières notes méritent quel–
        
        
          ques commentaires.
        
        
          L e cas de Mourad bey de T i r an est ca–
        
        
          ractéristique : i l passe du bagne au minis–
        
        
          tère des affaires étrangères, n'ayant d'au–
        
        
          tres titres que l a délation et le chantage.
        
        
          Les gens de son espèce n'ont pas le droit
        
        
          de se réclamer du parti Jeune Turc n i
        
        
          d'aucun parti, sauf celui des escrocs et
        
        
          mouchards.
        
        
          Quant à A l i Nouri bey, i l se p r é p a r e
        
        
          probablement à transiger à son tour. Juif
        
        
          suédois converti à l'islamisme, i l s'était
        
        
          constitué le bailleur de fonds d'un journal
        
        
          satirique illustré, paraissant en français,
        
        
          où le Sultan était violemment insulté, non
        
        
          sans une certaine verve grossière. Le
        
        
          temps l u i pa r a î t venu de faire une sou–
        
        
          mission avantageuse : i l a donc surpris l a
        
        
          bonne foi du correspondant du
        
        
          
            
              Times
            
          
        
        
          à Paris et s'est p r é s en t é à l u i comme i n –
        
        
          nocent de tout méfait envers le Sultan et
        
        
          comme un fonctionnaire fidèle n'ayant
        
        
          jamais perdu la bienveillance de ses chefs.
        
        
          A l i -No u r i bey aura d'ici peu de l'avance–
        
        
          ment. S i nous perdions Mun i r , i l le sup–
        
        
          pléerait très honorablement.
        
        
          r .
        
        
          
            Q .
          
        
        
          
            DOCUMENTS
          
        
        
          
            L'Arménie avant les massacres
          
        
        
          
            
              (
            
          
        
        
          
            
              Suite)
            
          
        
        
          Voici une autre pétition du même district
        
        
          de Kaza, adressée comme la précédente à
        
        
          l'archevêque d'Erzeroum :
        
        
          «
        
        
          Des zaptiés sont arrivés dans notre vil–
        
        
          lage à dix heures du soir, sous prétexte de
        
        
          lever les impôts ; ils ont brisé les portes de
        
        
          nos maisons, saisi nos femmes et nos enfants
        
        
          et les ont jetés demi-nus dans la rue. Puis ils
        
        
          les ont battus et les ont maltraités sans
        
        
          pitié. Ils ont choisi enfin trente femmes, les
        
        
          ont enfermées dans une grange et les ont
        
        
          violées. Avant leur départ, ils se sont
        
        
          emparés, selon leur habitude, de tout le
        
        
          fourrage et de tous les vivres. Nous vous
        
        
          prions de prendre connaissance de ces évé–
        
        
          nements et d'implorer la grâce du sultan.
        
        
          « 26
        
        
          mars
        
        
          1890.
        
        
          
            
              «
            
          
        
        
          
            
              Les habitants d'Arak :
            
          
        
        
          « (
        
        
          Signé) Mou
        
        
          
            R A D I A N , R E S S I A N ,
          
        
        
          
            R E R G H O Y A
          
        
        
          
            M E L K O N I A X . »
          
        
        
          Fonds A.R.A.M