«
C'était, d i t - i l , un spectacle affreux de voir d'innombrables-
corbeaux, attirés par l'odeur du sang, exécuter au-dessus des
cadavres des évolutions, en poussant de sinistres cris. Ils sem–
blaient accourir pour achever l'œuvre barbare des Kurdes ! »
Un
vartabed
(
prêtre célibataire), quatre
derders
grégoriens et
deux prédicants protestants furent égorgés. Les fanatiques maho-
métans, après avoir forcé un de ces
derders
nommé Nersès à se
coiffer du turban et à chanter
YEzan
(
cantique musulman) séries
marches du maître-autel de l'église, l'ont impitoyablement immolé,
en disant qu'il était déjà digne d'entrer au paradis du Prophète.
Cinq églises et deux temples sont saccagés, trois églises incen–
diées. Les assassins n'ont pas laissé un seul grain de blé aux sur–
vivants, et, pour leur ôter toute chance de salut, ils ont détruit
tout ce qu'ils n'ont pu emporter. Aussi, le froid venant en aide à
la faim fait-il chaque jour de nombreuses victimes dans les rangs
de ces pauvres malheureux.
Les villages arméniens situés à une lieue à la ronde d'Arabghir,
sont tous ravagés. Quant à ceux qui se trouvaient à une distance
de plusieurs heures, on n'en voit plus la trace. Sont toutefois
exceptés les villages qui ont embrassé l'islamisme.
A Malatia, les atrocités du fanatisme musulman ont été poussées
à l'extrême. Là, le massacre des Arméniens fut affreux. Le 1
e r
no–
vembre, un Arménien catholique nommé Grégoire était égorgé, et
deux jours après, le massacre commençait à la fois dans tous les
quartiers chrétiens ; i l dura du dimanche jusqu'au mardi soir,
5
novembre.
Trois mille Arméniens, grégoriens et catholiques, s'étaient
réfugiés dans l'église, l'archevêché et les écoles arméniennes
catholiques.
Le matin du 6 novembre, les mahométans donnèrent l'assaut à
l'église, sommèrent l'archevêque catholique, Mgr Korkorouni, de
leur livrer les grégoriens. Le prélat ayant refusé, les Turcs com–
mencèrent à mettre le feu à l'édifice. La situation des réfugiés était
désespérée. Heureusement le vicaire général de Mgr Korkorouni
ouvre à temps une porte donnant sur le jardin, et toute cette mu l –
titude alla se réfugier dans les jardins d'une famille turque v o i -
Fonds A.R.A.M