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nienne ne peut même protester contre ces actes, sûre qu'elle est
que ses oppresseurs seront absous comme toujours et qu'elle s'atti–
rera leur vengeance.
Les Arméniens de Modgan, de Sassoun, dePrenashin et d'autres
contrées montueuses gémissent sous le joug d'oppresseurs musul–
mans, qui les traitent comme des esclaves. Chaque bey s'est adjugé
un certain nombre de villages et de couvents, qui sont forcés de lui
payer des impôts dix fois plus onéreux que ceux qu'ils payent au
gouvernement, et quand i l a réduit à la dernière misère la popu–
lation, i l vend à un autre de son espèce ce qu'il considère comme
un bien à lui. Toutes les fois qu'un bey se brouille avec un autre
bey, i l se venge sur les sujets arméniens de celui-ci, lesquels, à
cette occasion, doivent s'attendre à des traitements quelquefois
atroces. I l est défendu aux Arméniens cantonnés dans leur j ur i d i c –
tion de nouer des relations avec les gouverneurs et les prélats de
Mousb,de Bitlis et de Diarbékir; on étouffe ainsi toute réclamation
contre les abus de pouvoir et l'on empêche l'éducation religieuse
de ces chrétiens, qui restent souvent sans prêtres et sans églises.
Quant aux Arméniens qui habitent la plaine, ils souffrent des
caïmacams et des mudirs, qui vendent la justice au plus offrant.
On les charge de toutes sortes de corvées, en même temps qu'on
les force à payer des impôts tellement lourds qu'ils dépassent leurs
ressources, très médiocres d'ailleurs.
Pour pouvoir satisfaire aux exigences du percepteur, le malheu–
reux paysan est obligé d'avoir recours à l'usurier, qui ne se fait
pas scrupule d'exiger 50 pour 100 et même 100 pour 100. I l a bien
quelquefois ses gerbes de blé, mais on y met le feu ; i l a bien son
bétail, mais on l'enlève.
Le couvent Innagnian a été dévasté par les Kurdes pour la qua–
trième fois. La'Gongrégation a protesté contre ces bandits, mais
les autorités locales n'ont pu ni voulu l u i rendre justice.
10
novembre 1878.
Bitlis. — Le corps ecclésiastique et les notables arméniens de
Bitlis
Tiennent
de soumettre au Patriarcat arménien un rapport
Fonds A.R.A.M