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Le s massacres de Constantinople en 1896.
Le 26 août dernier, vingt-cinq Arméniens, pris d'abord pour des
Hentchakistes, mais qui paraissent appartenir au parti drochakiste,
pénètrent en petits groupes dans la Banque ottomane, armés de
revolvers, de poignards et de bombes à dynamite. Ils tuent les
gendarmes qui la gardaient, barricadent les portes et les fenêtres
et se rendent maîtres de l'édifice, tout cela en trois minutes et avee
une audace rarement surpassée dans les annales des mouvements
populaires. Ils gardent la Banque tout un jour sans toucher aux
millions qui y sont entassés, ce qui est une nouvelle et éclatante
preuve de la proverbiale probité arménienne. Qu'il nous soit permis
d'ajouter que la plupart des journalistes européens qui ont traité de
«
brigands » ces conquérants de la Banque, n'auraient pu résister à
pareille tentation, eux qui s'abaissent dans la boue pour ramasser
les quelques piastres jetées par Hamid-le-Massacreur.
Gendarmes et soldats s'efforcent de déloger les Drochakistes,
commandés par M. Garabed Govanilian. Ces derniers font usage
de leurs armes et lancent des bombes explosibles dont l'une, d'après
un rapport de la Porte, fait voler en éclats une voiture avec quatre
femmes turques qui s'y trouvaient. Les assiégeants ripostent avec
leurs fusils ; ils tuent cinq Drochakistes et en blessent cinq autres.
Les survivants continuent la bataille et menacent de faire sauter la
Banque à l'aide de 17 kilos de dynamite qu'ils avaient transportée
dans des sacs d'argent et placée dans la cave. Ils envoient au Sultan,
en guise'de parlementaire, un des directeurs de la Banque, qu'ils
avaient retenu en otage avec cent soixante employés, et déclarent
qu'ils évacueraient l'édifice à condition qu'on leur permît de quitter
le pays sans être molestés et qu'on prît l'engagement de régler
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Fonds A.R.A.M