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L E S TURCS ONT PASSÉ L A . .
brûle tout ce qui restait debout dans ce riche village
arménien.
Un spectacle navrant règne actuellement dans les
montagnes. Les fuyards effrayés, nus et affamés ne
savent où donner de la tête. La mère cherche ses en–
fants, les enfants se lamentent loin des parents, des
créatures impitoyables poursuivent ces malheureux
avec une sauvagerie farouche, souillent les belles
vierges, les fiancées ou épouses et massacrent les
hommes. Les femmes vertueuses supplient leurs
maris de les tuer de leur propre main et de ne pas
les abandonner aux passions brutales de ces forcenés;
quelques-uns exécutent leur supplique puis se sui–
cident eux-mêmes auprès de leur épouse.
Les trois prêtres du village sont tués, l'abbé Nersès
reçoit une balle qui l'étend, mais comme i l a encore
un souffle de vie on lui casse les dents, et on lui
écrase la tête à l'aide d'une grosse pierre. Sa fille
toute effrayée va se jeter dans les bras de sa mère,
mais les monstres étouffent la malheureuse femme
et emportent la jeune fille. Elle se trouve actuelle–
ment chez Abbasoglou Ali,
kèhia
du village Kaypac,
où on l'a mariée de force. La fille d'Ohannès Agha
du village d'Entilli a été aussi enlevée et se trouve
chez le fils de Arpali Huyuk Kessadjik Ibo. Ce que nous
écrivons est connu de tous, mais i l y a bien d'autres
faits qui passent inconnus. Ils ont tué le prêtre Ohan-
nès, en remplissant de poudre sa bouche et en y
mettant le feu. Quant à un nommé Serkis qui était un
policier, on l'a amené sur la place publique d'Osma-
nié et l'on a affiché que chacun devrait manger un
morceau de sa chair; des centaines de cannibales se
ruent sur le malheureux, et lui coupent les morceaux
Fonds A.R.A.M