Pierre Quïllard
neur n'osait même plus faire d'enquêtes ni arrêter qui
que ce fût.
Békir pacha, nommé kaïmakam de Marsevan, ne
réussit qu'en septembre
1893
à bloquer avec plusieurs
milliers d'hommes la bande des terroristes cernés dans
un quartier de la ville ; la plupart s'échappèrent ; cinq
furent pris vivants, quatre tués, parmi lesquels l'Armé–
nien russe Léon Zakharian, représentant du comité de
Londres. Celui-ci dans l'été de
1893
avait été découvert
en compagnie de deux élèves du collège dans la
chambre de l'un d'eux ; les missionnaires avaient la
ferme intention de le livrer au gouvernement. Ils n'y
renoncèrent que sur la menace de représailles et surtout
parce que Zakharian et ses amis avaient mis le revolver
au poing.
La conduite des missionnaires, lors des événements de
Marsevan, indique assez qu'ils n'étaient aucunement
d'accord avec les révolutionnaires arméniens. Au con–
traire tant en Angleterre qu'en Amérique ils les
désavouaient publiquement et leur attribuaient outre
des meurtres odieux — en réalité les révolutionnaires
ne tuèrent que les espions appartenant à leur propre
nation —des desseins politiques qu'ils n'eurent jamais.
C'est eux en grande partie qui contribuèrent à répandre
enEurope la légende russe ; elle est exposée tout au long
dans une lettre du révérend docteur Cyrus Hamlin,
adressée au
Congregationalist
de Boston ; le docteur
Hamlin rapporte une conversation qu'il a eue avec un
représentant des Comités et où tout le plan des révolu–
tionnaires lui aurait été dévoilé : i l ressort de ce
dialogue que les Arméniens pensaient que les massacres
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Fonds A.R.A.M