LES FAITS
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des Arméniens de leurs maisons commença. Des groupes
d'hommes, de femmes et d'enfants avec des ballots
et de petits paquets sur leur dos, furent rassemblés
dans un petit chemin de traverse près du consulat ;
sitôt qu'ils formaient un groupe d'environ une centaine
d'individus, ils étaient poussés devant le consulat par
les gendarmes, baïonnette au canon, sous la chaleur
et dans la poussière, sur la route d'Erzeroum. Hors de
la ville on les fit arrêter ; on en forma un groupe de
2000
personnes environ pour les envoyer plus loin. Trois
groupes pareils, faisant ensemble 6000 personnes, furent
déportés durant les trois premiers jours ; d'autres
groupés, plus petits, de Trébizonde et des environs,
qui ont été déportés plus tard, atteignaient le chiffre
de 4000 environ. Les pleurs et les plaintes des femmes
et des enfants déchiraient le coeur. Quelques-uns de ces
malheureux appartenaient à des milieux riches et con–
sidérés. Ils étaient habitués à la richesse et au bien-
être. I l y avait là des ecclésiastiques, des commerçants,
des banquiers, des juristes, des mécaniciens, des arti–
sans, des hommes de tous les milieux. Le gouverneur
général me disait qu'ils étaient autorisés à se munir
de voitures pour le voyage ; mais personne ne semblait
prendre des dispositions pour cela. Je connais ce–
pendant un commerçant qui paya 15 livres turques
pour une voiture qui devait le conduire lui et sa
femme à Erzéroum. Lorsqu'ils arrivèrent à un lieu
de rassemblement, éloigné d'environ 10 minutes de
la ville, les gendarmes ordonnèrent d'abandonner la
voiture qui fut renvoyée en ville. Toute la population
mahométane savait, dès le début, que ces gens seraient
une proie facile entre leurs mains, et ils furent traités
en criminels, A Trébizonde,
il était défendu aux Ar-
Fonds A.R.A.M