VIII
PRÉFACE
pable de réagir, au nom de la loi morale, contre
les entraînements de la passion nationale. L'élite
se confond dans la masse ou, si elle la dirige,
c'est pour régarer plus sûrement. La masse du
peuple allemand est arrivée à croire que VAlle–
magne n'a pas voulu la guerre et a été attaquée,
que la Belgique a violé sa neutralité et mérité
ses malheurs, que les Français maltraitent les
blessés, que les Arméniens ont massacré les in–
nocents Turcs, etc. Combien d'autres falsifica–
tions inouies des faits et des textes sont acceptées
aujourd'hui sans discussion dès que l'intérêt
allemand est en jeu.
Pourtant, dans ce désert moral, quelques voix
isolées, très rares et très timides, nous ne dirons
pas se sont élevées, car le monde ne les a pas
entendues, mais ont murmuré dans la pénombre,
au péril de leur liberté. Le témoignage de ces
voix isolées a d'autant plus de valeur qu'il lui est
plus difficile de se faire entendre; leur jugement
a d'autant plus de poids qu'il va à Vencontre des
intérêts et des passions allemandes et que les
pouvoirs publics ont cherché plus âprement à
l'étouffer.
Un document de cette nature est récemment
parvenu entre nos tnains. C'est le
«
Rapport sur
la situation du peuple arménien en Turquie
par le D
r
Johannes Lepsius, Pr és i den t de la
Deutsche Orient-Mission et de la Société ger–
mano- a rmén i enne (Tempelverlag, Potsdam,
Fonds A.R.A.M