DEVANT LE PROBLÊME ARMÉNIEN
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surveillance. Elle invoqua encore cette même souveraineté en matière
judiciaire pour l'élaboration prévue d ' un projet de réforme j ud i c i a i r e
par une Commission composée de juristes étrangers et ottomans. Enfin
elle demanda une indépendance complète financière et économique et
elle ne consentit à une protection des minorités de race, de r e l i g i on et
de langue que suivant les mêmes règles que celles consacrées par les
traités de Saint-Germain, de Neuilly et de T r i anon ( 1 ) .
La Délégation turque appuya ses revendications territoriales en ce
qui concerne Smyrne et la Thrace par des statistiques q u i furent con–
testées par la Délégation grecque. En présence de ces divergences d'o–
pinion, les Puissances proposèrent, le 25 février, aux belligérants de
soumettre la question de la population de ces deux zones à l'arbitrage
d'une Commission internationale d'enquête et à accepter les autres
clauses du traité de Sèvres maintenues sans modifications, M. L l o y d
George, Président de la Confâeence, ajouta cependant que les clauses
relatives à l'Arménie et au Ku r d i s t an devaient encore être l'objet de
discussions dans la présente Conférence. La Délégation turque s'em–
pressa d'accepter la proposition de l'enquête, dont le principe même
ébranlait l'édifice construit
à
Sèvres, et se réserva u n recours
à
Angora
pour les conditions accompagnant la proposition des Alliés. La Déléga–
tion grecque déclara devoir demander des i ns t r uc t i ons générales à son
gouvernement.
En attendant ces réponses, la Conférence passa, le 26 février, à l'étude
du problème arménien. 11 entendit d'abord les représentants des deux
Délégations arméniennes, Boghos Nubar Pacha et M. Aharonian agis–
sant en plein accord.
Boghos Nubar Pacha, chef de la Délégation nationale, parlant au nom
des Arméniens de Tu r qu i e , insista sur le maintien des dispositions du
traité de Sèvres concernant l'Arménie. I l fit valoir que les puissances
qu i avaient conclu ce traité poursuivaient la libération des Arméniens
de
Turquie
e l que l ' un i o n avec l'Arménie d u Caucase n'avait été décidée
qu'à la suite de la séparation de cette dernière d'avec la Russie. L'occu–
pation de la République pa r les Soviets n'était donc pas une raison
pour empêcher les Puissances de libérer les Arméniens de Tu r q u i e .
Les quatre vilayets étaient, i l est v r a i , occupés pa r les Kémalistes,
mais les Alliés disposaient de moyens de pression dont le mo i nd r e était
la continuation de l'occupation des territoires se trouvant sous leur
contrôle m i l i t a i r e . Quant
à
la Cilicie, dont la plus grande partie faisait,
(1)
V. les communiqués officiels delà Conférence de Londres dans
VEurope nouvelle
du 19 mais 1921, n ' 12, et l'exposé du délégué d'Angora, Bekir Sami Bey, lu à la séance
du 24 février 1921, dans l'Asie
française,
mars 1921, n» 190, p . 90.
Fonds A.R.A.M