L A C R È T E E T L E K H A L I F A T
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lèges sociaux et économiques les lie indissoluble–
ment au sort du Khalifat : à Mételin, à Chios, à
Rhodes, celte frange insulaire de l'Islam a le patrio–
tisme toujours inquiet des populations-frontières.
»
Mais de ces Nèsiotes, les musulmans crétois,
étant de plus pure race grecque encore, sont les plus
pénétrés d'hellénisme et de culture européenne,
les plus capables de nous donner sur-le-champ les
hommes nouveaux que nous mettrions vingt ans,
trente ans, un demi-siècle peut-être, à former dans
nos autres provinces. Tout ensemble, ils sont les
plus enclins à la civilisation de l'Occident et les plus
lîdèles à-la patrie ottomane, ayant lutté depuis deux
siècles contre le
giaour
et repoussant de toute leur
haine héréditaire les cajoleries et les offres des
séducteurs.
»
Si dans votre parlement français quarante
députés de l'Alsace-Lorraine, aujourd'hui comme
autrefois, apportaient aux exubérances de vos gens
d'outre-Loire la sage pondération de leur bon sens
et de leur calme, si leur foncière probité, leur netteté
morale servait d'exemple et de frein, vos députés
eux-mêmes disent que vos affaires nationales seraient
en meilleure voie. Toutes différences gardées, — et
nous savons combien elles sont grandes entre la
ruse Cretoise et la moralité alsacienne, — nous
avons nos gens d'outre-Loire dans nos Arabes et nos
musulmans d'outre-Taurus : l'intelligence et le sens
pratique des Nèsiotes doivent leur faire contrepoids;
la Crète même autonome doit rester pour nous un
réservoir de ministres et de parlementaires, de
publicistes et d'orateurs; qui sait même si, les chré–
tiens de l'île voyant un jour la place que notre
Fonds A.R.A.M