INTRODUCTION
X I
semblait perdue. A ses auditeurs de la
Ligue mari–
time,
i l disait quelle charge d'armements nouveaux
la prochaine rupture de l'équilibre mé d i t e r r a n é e n
allait valoir à notre France :
Vous sentez bien, n'est-ce pas, q u ' a p r è s la crise bos–
niaque d'hier, a p r è s la crise tripolitaine d'aujourd'hui, la
crise é g y p t i e n n e , albanaise, ma c é d o n i e n n e , que sais-je,
arabe ou syrienne de demain, le j o u r du dernier juge–
ment balkanique pourrait soudain se p r é s e n t e r devant
vous. Si demain éclataient sous les murs d'Avlona, de
Salonique et de Stamboul les fanfares vous a n n o n ç a n t
la c u r é e , si vous perdiez dans la Mé d i t e r r a n é e levantine
ce correspondant, cet associé, cet ami que, depuis
quatre siècles, fut pour vous l'Empire ottoman, croyez-
vous que rien ne serait c h a n g é dans vos sécurités n i
dans vos risques? Quand disparut du Continent
l'héroïque Pologne, le résultat pour vous fut un siècle
de guerres continentales et d'invasions, puis quarante
ans de cette paix a rmé e qu i vous tient à la gorge. Le
jour où d i s p a r a î t r a i t l'héroïque Turquie, soyez s û r s
qu'il vous faudrait le courage et la force d'endosser en
votre domaine mé d i t e r r a n é e n la même armure pacifique
qu'à votre t r o u é e des Vosges, —sinon les deux Frances
qui se font aujourd'hui vis-à-vis sur les rivages de
Toulon et de Bizerte pourraient sentir les menaces, les
douleurs peut-être de la s é p a r a t i o n .
En cet hiver de 1911-1912, tout présageait
l
!
imminence du désastre : à l'intérieur de l'Empire
ottoman, le régime jeune-turc avait po r t é tous ses
fruits; à l'extérieur, le d é b a r q u eme n t italien en
Tripolitaine et la conclusion des ententes balka-
Fonds A.R.A.M