LA TURQUIE ET LE TANZIMAT.
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autres compagnons eurent à choisir entre le même sort et
l'apostasie.
Ceux de la suite des Bogarmites passèrent sans hésiter
à l'Islam; par contre les nobles orthodoxes et catholiques
restèrent fidèles à leur religion et furent autant de martyrs.
Quant aux seigneurs qui avaient refusé de suivre leur roi
au camp de Mahomet IL, ils s'enfuirent pour échapper aux
supplices, les uns en Hongrie, les autres à Raguse. Enfin
trente mille sujets bosniaques arrachés à leurs foyers,
furent incorporés pour la plupart aux Janissaires.
Le Sultan attribua aux renégats les terres laissées va–
cantes par la mort ou par l'émigration de leurs frères
chrétiens et c'est ainsi que les descendants de ces trans–
fuges possèdent encore aujourd'hui en Bosnie et dans les
contrées serbes voisines la plus grande partie du sol qui
n'appartient ni aux mosquées, ni à l'État (1).
La Bosnie, grâce à l'abjuration d'une partie de sa no–
blesse et l'Herzégovine qui lui fut annexée en 1498, con–
servèrent une sorte d'autonomie qui permit aux seigneurs
indigènes d'administrer le pays plutôt à titre de vassaux
que de sujets, état de choses qui se maintint à peu près
intact pendant plus de trois siècles.
Les beys bosniaques toutefois ne surent point mettre à
profit ce régime privilégié ou plutôt ils n'en abusèrent que
trop en opprimant les populations chrétiennes et en susci–
tant contre eux des plaintes de plus en plus désespérées.
(1)
Le massacre de
Blaga
suivi de la soumission do la Bosnie, est
un des faits les plus caractéristiques de ces « entreprises de la force »
qui constituent l'histoire de l'Empire ottoman. Avant de surpren–
dre les nobles bosniaques, Mahomet II s'était assuré que la loi reli–
gieuse couvrait sa trahison et l'autorisait au parjure.
Fonds A.R.A.M