LA TURQUIE ET LE TANZIMAT."
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Ce mode de conquête pacifique avait, paraît-il, créé
parmi les Grecs et les Arméniens assez de sujets au Czar
pour que le Divan dut aviser aux moyens d'en arrêter les
progrès. N'osant toutefois se mesurer avec la Russie, i l
jugea plus sûr et moins compromettant de s'attaquer à
l'Europe, et i l attendit un moment favorable pour inviter
toutes les puissances par un avertissement collectif à
observer partout les limites légales de leur droit de pro–
tection.
Ce moment se présenta au milieu de conjonctures qui
touchaient moins directement la Russie, c'est-à-dire pen–
dant les troubles du Liban. A propos d'une contestation
entre le pacha de Damas et les consuls d'Angleterre, de
France et d'Autriche, la Porte demanda que les listes de
protégés fussent révisées de concert avec les autorités
turques, et que tous ceux dont les titres étaient contes–
tables aux termes des traités et des capitulations, en fussent
éliminés.
Les trois puissances occidentales se déclarèrent prêtes à
cette révision et la Russie ne put se refuser à y concourir.
Mais soit que l'opération eut été incomplète, soit que
d'autres faits d'irrégularité se fussent produits après coup,
la Porte, à six mois d'intervalle, décida souverainement
que les rayas qui, après avoir obtenu une protection
étrangère, reviendraient en Turquie, soit pour y rési–
der, soit pour s'y occuper de nouveau de leur commerce
et de leurs autres affaires, seraient, ainsi que leurs fa–
milles, considérés en toutes circonstances comme sujets
ottomans, sans que les tribunaux pussent admettre l'in–
tervention de l'autorité étrangère dont ils prétendraient
relever.
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Fonds A.R.A.M