L'interrogatoire
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Le président:
Vos parents vivaient-ils dans de bonnes conditions financières?
L'accusé:
Oui, très bonnes.
Le président:
Ont-ils souffert pendant la guerre?
L'accusé:
Jusqu'aux massacres, nous n'avons souffert de rien. Les affaires
étaient seulement un peu plus calmes.
Le président:
Aviez-vous des frères soldats?
L'accusé:
Oui, le cadet était soldat.
Le président:
Où a-t-il combattu? Sur quel front?
L'accusé:
I l n'était pas au front mais à Kharpout, au sud d'Erzingian.
Le président:
Cette ville se trouve-t-elle en Arménie?
L'accusé:
Oui, dans la Turquie d'Asie.
Le président:
Était-il chez lui en 1915?
L'accusé:
Oui, il était revenu en 1915 en congé, quand les massacres ont
commencé.
Le président:
Avez-vous été vraiment surpris par ces massacres à Erzingian
ou en aviez-vous déjà vu des signes précurseurs?
L'accusé:
Nous croyions toujours que des massacres allaient avoir lieu car
nous entendions dire autour de nous que des hommes avaient été
tués.
Le président:
Avait-on déjà des idées sur la manière dont se déroulaient ces
massacres? Qu'en disait-on? Pourquoi avaient-ils lieu?
L'accusé:
Dès le début de la guerre, des massacres avaient eu lieu; déjà il y en
avait eu à l'heure de ma naissance et quand mes parents sont venus
habiter Erzingian. J'ai toujours entendu mes parents parler de mas–
sacres.
Le président:
Avant cette époque? Quand se situent les massacres précédents?
L'accusé:
Dans les premiers mois de 1894, il y avait eu des massacres à cet
endroit.
Le président:
Y a-t-il eu des signes précurseurs pour les massacres de 1915?
Savait-on déjà pourquoi les massacres avaient lieu?
L'accusé (ne comprenant pas):
Je n'étais pas encore né à l'époque.
Le président:
En 1915?
Fonds A.R.A.M