ARMENIENNE
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Valeur historique et littéraire.
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On a repro–
ché à Eghiché de n'avoir pas décrit les événements
avec l'impartialité et l'exactitude qui doivent être le
souci principal d'un véritable historien. Ce repro.
che n'est justifié qu'en partie, car notre auteur n'a
pas eu l'intention de faire œuvre d'historien; i l s'é–
tait fixé comme but l'exaltation de l'héroïsme et des
vertus dont les Arméniens de toutes classes et de tous
sexes avaient fait preuve dans la défense de la foi
contre un ennemi redoutable, le puissant ro i
de Perse. Son ouvrage est donc une sorte de récit
épique à la manière des poètes romantiques ou des
tragédiens français, tels que Racine et Corneille; i l
a mis ses compagnons d'armes en parallèle avec
Vassak Suni et les amis de ce traître; ayant à sa
disposition deux types de caractère opposé, i l a glo–
rifié le patriotisme de l'un et flétri la trahison de
l'autre. Toutefois, en tant que témoignage histori–
que, cet ouvrage n'a plus maintenant la valeur qu'on
l u i attribuait naguère. I l contient des discours qui
assurément ne sont pas authentiques; c'est du reste
un procédé commun à la plupart des anciens histo–
riens arméniens.
Eghiché n'est pas à l'abri des reproches faits à
plusieurs auteurs d'avoir exploité les écrivains étran–
gers. C'est ainsi que dans les parties descriptives
i l a utilisé Philon, comme le releva le P. Avker, pour
la première fois, dans sa version latine de ce Père
grec. I l a emprunté aussi à Marouthas. Quant à la
partie purement historique de la Résistance var-
danienne, on croit que pour sa composition i l a
exploité
l'Histoire
de Parbétsi, mais a revêtu ses
emprunts d'un style incomparablement plus élevé
que celui de cet historien.
Au point de vue de la langue et du style,
l'Histoire
d'Eghiché vient immédiatement après le
traité d'Eznik. Les critiques, tant arméniens qu'é–
trangers, sont d'accord pour signaler la pureté de
l'arménien dont s'est servi Eghiché- On n'y relève
pas de trace d'hellénisme, quoique l'ouvrage ait été
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