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rivé à dire, parlant de l'Egypte et de la Syrie,
que s'il eût enlevé Saint Jean d'Acre, ce qu'il
eût dû faire, il opérait une révolution dans l'O–
rient... Saint Jean d'Acre enlevé, l'armée fran–
çaise volait à Damas et à Alep ; elle eût été en
un clin d'oeil sur l'Euphrate ; les chrétiens de
la Syrie, les Druses, les chrétiens, de l'Arménie
se fussent joints à elle ; les populations allaient
être ébranlées... J'aurais atteint Constantinople
et les Indes ; j'eusse changé la face du monde.»
Napoléon I
e r
n'atteignit pas Constantinople,
il ne traversa pas l'Arménie, i l ne changea pas
la face du monde. Les dominateurs sont tôt ou
tard dominés. Les peuples, de jour en jour, ne
veulent plus être dominés. Ils demandent à être
gouvernés,
à être administrés, aussi sagement
que la chose est possible pour les cerveaux hu–
mains.
Et le rêve, entrevu au début du xix
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siècle,
vient enfin, cent ans plus tard, de trouver sa
réalisation. Les légionnaires français et britan–
niques, opérant leur jonction avec les légion–
naires arméniens, ont dompté le dominateur de
la Syrie et de la Cilicie. I l ne s'agit plus de tra–
verser l'Arménie et de foncer sur l'Inde ; i l s'a–
git d'affranchir à jamais des populations qui,
trop longtemps, ont gémi sous la férule du Turc;
il s'agit, cette fois, de changer la face du mon–
de, non plus au sens où l'entendaient les con–
quérants de jadis, mais en permettant à chaque
peuple, comme à chaque individu, de vivre et
de respirer librement. L'armée arménienne, de
concert avec ses alliés, réalise en ce moment
cet idéal sublime, entrevu et préparé, pour une
très grande part, par l'Eglise nationale armé–
nienne.
J'ai dit.
Fonds A.R.A.M