dans la .Ville-Nouvelle (Nor-khaghakh) (i), au mi–
lieu de ses exercices spirituels, dont nous avons
déjà parlé. Lafinmarquée par le Christ atteignit
le saint après quelques jours de maladie. Lors–
que Dieu voulut enlever le saint du milieu des
disciples qu'il avait lui-même élevés, et le mettre
parmi les troupes des saints, Mesrob, dominant
la maladie, se mit sur son séant au milieu de l'as–
semblée, et, élevant ses bras [qui avaient] toujours
été tendus vers le ciel, il bénit la très-sainte
Trinité et confia ses disciples à la grâce de Dieu
qui conserve tout, pour qu'ils demeurassent
.
fermes dans la foi et la pratique de la vertu, et
qu'ils se conformassent à la justice des saints
pères qui approchent le Christ.
Voici les noms des principaux disciples qui
étaient rassemblés chez lui : le premier Joseph (a),
le second Thotig
(3),
hommes sages et discrets;
parmi les guerriers le premier Hémaïak, de la
race des Mamigoniens
(4),
le second Vahan, de
la race des Amadouni (5), généralissime de la
noble Arménie, tous deux pieux et craignant
Dieu. Et tandis que les mains du saint étaient le–
vées au ciel, une vision merveilleuse, le signe de
la croix, lumineux et radieux, se fit voir sur la
maison où expirait le bienheureux. Chacun put
voir ce signe sans que son voisin le lui indiquât.
Le saint, ayant fait ses recommandations de cha–
rité et de concorde, ayant béni ceux qui étaient
au loin et ceux qui étaient présents, et ayant
rendu au Seigneur des actions de grâce, expira
aussitôt en l'honneur de la très-sainte Trinité.
Hémaïak et Vahan, avec le cérémonial funèbre
accoutumé, et accompagnés d'une foule de peuple
venue de toutes les parties du pays, enlevèrent
son corps; tous chantaient des psaumes, des
hymnes et des chants spirituels, portaient des
cierges et desflambeauxallumés, et brûlaient des
encens odoriférants. Conduits par le même signe
(1)
Moïse de Khorène
(
Hist. d'Arm.,
liv. m, ch. 67)
dit que Mesrobmourut le 13 dumois de méhégan, dans
la ville de Vagharschabad, qui portait en effet le nom
de Nouvelle-Ville, que lui donnent plusieurs écrivains.
Cf. Indjidji,
Arm. anc,
p. 471.
(2)
Joseph de VaîotzdjEor du village de Khoghotzim,
qui succéda à Sahag comme patriarche, en 441, après
que Mosrob, qui administrait le trône pontifical, eut
cessé de vivre. Joseph occupa le patriarcat jusqu'à l'an–
née 452.
(3)
Cf. Moïse de Khorène,
Hist. d'Arm.,
liv. m,
ch. 67.
(4)
Hémaïak était frère de Hamazasbian et de Vartan,
et petit-fils de saint Sahag. — Cf. Moïse de Khorène,
Hist. d'Arm.,
liv. ui, ch. 58.
(5)
Cf. Moïse de Khorène,
Hist. tfArm.
,
liv. m,
ch. 58.
S DE MESROB.
15
lumineux de la croix qui les précédait, ils trans–
portèrent le corps de Mesrob à Oschagan (i),
et là ils déposèrent le sainthomme de Dieu dans la
demeure des martyrs, et célébrèrent la fête offi–
cielle du bienheureux en son souvenir. Après cela,
le signe de la croix disparut et chacun d'eux s'en
retourna chez soi, en glorifiante! en bénissant
Dieu pour la merveille que le Seigneur fit voir
sur [le corps] du docteur [Mesrob] (a).
Trois mois après, le pieux 'Vahan Amadouni,
favorisé par Dieu, voulut bâtir un temple en
l'honneur du nom de Dieu, sous l'invocation du
saint docteur, et il éleVa avec des pierres taillées
de magnifiques autels richement ornés. Là, au-
dessous de l'autel de l'abside, il plaça les reliques
du saint. Il orna la maison de Dieu et l'autel du
sacrifice vivifiant du Christ avec des vases d'or
et d'argent et avec des pierres précieuses. On
établit, comme desservant de cette église, son
disciple Thotig, personnage sage et pieux, avec
d'autres encore, pourcélébrer le service quotidien.
D'après la désignation des saints Pères, on nomma
Joseph et Jean
(3),
hommes sincères et chastes,
pasteurs du peuple. Or il leur arriva, après la mort
des saints, [d'endurer] au nom du Christ toutes
sortes de tourments qui leur furent suscités par
les tyrans, en Perse, dans la ville de Ctésiphon
(
Dizpon). Là, ils méritèrent le titre de confesseurs,
et s'en retournèrent dans le pays d'Arménie pour
reprendre la direction de l'Église.
Le bienfaiteur Vahan mourut tout à coup et
fut reçu avec joie par tous les saints. S'étant
montré un vraifilsde sa patrie, d'où sortit l'hu–
manité (4)
9
il fut digne d'obtenir par la grâce du
Christ la vie éternelle.
Maintenant que nous avons écrit brièvement la
vie et la mort des bienheureux saints Pères (Sahag
et Mesrob), nous achèverons notre discours. Nous
n'écrivîmes pas ces choses en nous informant des
anciennes traditions; mais nous avons rapporté
[
l'histoire] des hommes que nous avons nous-
méme vus de nos yeux, et des actes spirituels des
(1)
Ce village fortifié appartenait à Vahan Amadouni,
et était situé dans le canton d'Arakadzodn, province
d'Ararat (Moïse de Khorène,
111,
9). —
Cf. Indjidji,
Arm. anc.,
p. 439.
(2)
Moïse de Khorène ( m, 67 ) raconte qu'il y eut une
discussion pour savoir où le corps du saint serait trans–
porté. Les uns voulurent le déposer à Vagharschabad ;
les autres, et Vahan à leur tête, demandaientque les re–
liques de Mesrob fussent placées à Oschagan. On se ran–
gea à ce dernier avis.
(3)
Cf. plus haut, p. 10 et note 4.
(4)
On sait qu'après le déluge, l'arche de Noé s'arrêta,
dit la tradition, sur le mont Ararat, en Arménie.
Fonds A.R.A.M