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Plusieurs de ces officiers % note M. Gibbons,
exprimèrent l'opinion que c'était bien fait, puisque
le consul s'était mêlé de ce qui ne le regardait pas.
On observe chez les officiers jeunes-turcs eux-
mêmes une hostilité marquée à l'égard des chré–
tiens en général. Cependant, sauf le meurtre des
deux Américains précités, on se garde bien d'at–
taquer les étrangers. D'ailleurs, la consigne est
formelle : Ad i l bey, sous-secrétaire d'Etat au mi -
nistère de l'Intérieur, répondant à la dépêche du
val i , vient de télégraphier de Constantinople: «Ne
touchez pas aux Européens » , ce qui implique
qu'en revanche on peut continuer à exterminer les
Arméniens.
La boucherie se poursuit donc tout le long de la
journée du 15, de la nuit et du lendemain, ven–
dredi , 16. Ce sont mi l le scènes de carnage, d'hor–
reur et de luxure que l'imagination s'efforce en
vain de se représenter. La ville est au pouvoir de
gens qui n'ont plus rien d'humain. Ils accourent,
tuent , coupent, tai l lent , et repartent haletants, ru i s –
selants de sueur et de sang, hurlant comme des
fauves. Ils font i rrupt i on dans les maisons, dans
les églises et les écoles bondées de réfugiés. Les
victimes, par centaines, s'élancent dans les rues,
petites et tortueuses, cherchant une issue, et brus –
quement elles sont arrêtées par un incendie, par
des amas de cadavres et de blessés, véritables
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I I s'agit d'officiers jeunes-turcs.
Fonds A.R.A.M