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Dans la ville, 5o filles ou femmes ont été enlevées. Dans les villages, le nombre
est incalculable.
Les pertes matérielles, pour la ville seulement, s'élèvent à 2 millions de livres
turques.
Les Musulmans ont eu 195 morts, parmi lesquels 70 individus se sont tués entre
eux pour le partage du butin.
Dans la dernière entrevue que j'avais eue avec le Gouverneur, je l u i avais demandé
verbalement, mais sous forme de réquisition, une garde pour le Consulat et le cou–
vent, si les circonstances l'exigeaient. I l me répondit, que c'était son devoir, et que, le
cas échéant, i l n'y manquerait pas. I l a envoyé au Consulat 9 zaptiés et un officier
et personne au couvent. Je l u i adressais réquisitions sur réquisitions; dne m'a jamais
répondu, et ce n'est qu'après avoir vu le pavillon monter et descendre pendant toute
une journée qu'il s'est enfin décidé à me faire demander par un tchaouch ce que je
désirais. J'ai dit à ce sous-officier que j e voulais une garde suffisante pour le couvent
et des renforts pour mo i . I l me fit observer que les soldats ne pouvaient pas aller au
couvent, parce que, sur le parcours, les chrétiens tiraient sur eux. A quoi, je l u i
répondis que, puisque les zaptiés et les soldats turcs n'étaient pas faits pour aller au
feu, je monterais moi-même sur la terrasse pour inviter les chrétiens à ne pas tirer.
C'est ce que j ' a i fait devant l u i . Peu après, dix soldats et un officier sont arrivés au
Consulat, mais aucun n'est allé chez les Pères. Nos protégés sont donc restés sans
garde pendant les trois jours du massacre, et bien souvent ils ont été en danger.
Après ces trois jours de massacre, après avoir tué plus de 3 , 000 chrétiens, leur
avoir pris tout ce qu'ils possédaient, on pouvait espérer que le Gouvernement leur
accorderait un semblant de protection. Hélas, i l n'en a.rien été; ils ont été traqués
après comme avant, et ils ont été l'objet des injustices les plus criantes. On les a dés–
armés avec la plus grande rigueur, tandis qu'on laissait aux musulmans leurs armes.
Emprisonnés pour avoir été la cause du soulèvement, on les a torturés jusqu'à ce
que mort s'ensuive, pour qu'ils se dénoncent entre eux et qu'ils fournissent aux auto–
rités des moyens d'accusation. On est allé jusqu'à supprimer à la Communauté armé–
nienne grégorienne les quelques secours qu'elle recevait pour la nourriture des
familles restées sans ressources, parce que l'Evêque n'avait pas voulu signer une pièce
constatant la culpabilité des siens. Pendant quarante-six jours, jusqu'à l'arrivée de
Zia Pacha et surtout d'Abdullah Pacha, la terreur a régné dans la ville ; le Gouver–
neur n'a pris aucune mesure pour la calmer. Bien au contraire, les musulmans, con–
fiants dans l'impunité qui leur était assurée, n'ont pas craint de montrer aux chrétiens
la même hostilité et ont commis, en plein jour, de nouveaux crimes. On peut dire
qu'Aniz Pacha a pris à tâche de protéger les coupables et de punir les victimes.
Les événements que je viens de raconter, non sans une pénible émotion, Monsieur
l'Ambassadeur, étaient décidés depuis longtemps à Diarbékir. Vous les aviez prévenus
une première fois et, maintenant encore, c'est grâce à vous que le désastre n'a pas
été complet. Tous les chrétiens qui restent savent qu'ils vous doivent la vie, et les
malheureux voudraient pouvoir vous la consacrer pour vous prouver leur reconnais–
sance.
MEYRIER.
DOCUMENTS DIPLOMATIQUES.
Arménie.
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Fonds A.R.A.M