les A r m é n i e n s renferme 1.734 familles ar–
mé n i e n n e s et 155 familles kurdes.
B i e n
que les Ku r d e s , à peu d'exception, n ' h a b i –
tent point les circonscriptions a r m é n i e n –
nes, ils sont toujours dans leur voisinage.
Les Ku r d e s habitent aux environs de
Kh o u l p , Kh i a r i k et Poussanalz Ka v a r .
Avant 1894, le Sassouniole avait quelque
moy e n d'existence. Le s habitants des vil–
lages de Da i v o r i k allaient j u s q u ' à Bo u l a -
n i k h , Khnou s s , é c h a n g e r contre le blé les
produits de leurs montagnes : poires,
pommes, grenades, figues et du miel.
Ap r è s les massacres, le gouvernement i n –
terdit la circulation aux Sassouniotes, et,
par c o n s é q u e n t , l ' é c h a n g e des produits
devint impossible. Le s habitants de D a i –
v o r i k fabriquaient des instruments en fer
et les vendaient aux habitants de l a plaine;
aujourd'hui i l ne leur est point permis de
venir à la plaine. Qu a n t aux habitants des
autres localités, ils é t a i e n t des pAtres à
q u i , pendant les massacres, on enleva les
troupeaux, en les privant ain*i de leurs
moyens de vie.
(
D'après
Hayrènik,
de Doslon).
•
-
Lettres de Van et de Moush
Bel exemple de self-défense.
—
Le Kurde
sauvage lui aussi a commencé à n'avoir aucune
considération pour l'Arménien et celui-ci à son
tour sait désormais faire preuve de sa colère
d'une manière positive. Huit Kurdes hamidiés et
deux Arméniens indigènes, armés de fusils, atta–
quent la maison de Kévork, chef du village de
Eghusal, du district de Thémour, près de Van ;
les susdits deux Arméniens avaient excité l'ap–
pétit des brigands hamidiés Kurdes en leur
racontant que le chef du village possédait
8
oo livres et ils avaient ainsi attaqué sa maison.
Le chef du village se trouvait chez lui avec ses
frères, ses enfants et quelques parents. On
frappe à la porte; à la demande faite de l'inté–
rieur, la réponse fut : « Ouvrez, nous sommes
des voyageurs ». On enfonce la porte; le chef
du village pris de soupçon, s'approche de la
porte, et en même temps, 8 à io coups de fusil
sont tirés du dehors. Heureusement le chef.du
village a su se retirer à temps et est resté sain
et sauf. Ceux qui se trouvaient dans la maison
sont devenus furieux et sans avoir aucune peur
se son\^nTparés des bâtons, etc., qu'ils avaient
trouvés, et après avoir ouvert la porte subite–
ment ont attaqué les brigands armés; ceux-ci,
pris au dépourvu, ont aussitôt pris ia. fuite.
Le chef du village réussit à en blesser quelques-
uns à coups de bâton, et à en arrêter deux à
qui il enlève les fusils et leur demande ce qu'ils
lui voulaient. Les Kurdes racontent qu'ils étaient
venus lui enlever son argent et que deux Armé–
niens les avaient conduits chez lui. Le chef du
village exige des Kurdes de lui ramener les deux
Arméniens, lès menaçant de les remettre au
gouvernement s'ils n'obéissaient pas à sa de–
mande. Les Kurdes, joyeux, acceptent et crient
à leurs camarades qui s'enfuyaient de ramener
les deux Arméniens. Les Kurdes arrêtent l'un
et le ramènent, tandis que l'autre Arménien
arrive à se sauver. Le chef du village arrête
l'Arménien sans pourtant relâcher les Kurdes.
Les autres Kurdes qui s'étaient enfuis, voyant
que le chef du village n'a pas tenu sa promesse,
tirent un coup de fusil de loin, mais la balie
au lieu d'atteindre le chef du village, blesse
grièvement ie Kurde, leur camarade, à la poi–
trine. Sur ce bruit, arrivent des soldats qui
étaient, paraît-il, à la recherche des Kurdes qui
s'étaient enfuis de ia prison vers cette époque;
ics soldats sont mis au courant des faits, après
quoi ces derniers attachent les Kurdes et l'Ar–
ménien, les mettent dans un chariot (ils ne
pouvaient aller à pied, car le chef du village les
avait sérieusement roués de coups), et les con–
duisent à la prison de ia ville.
LETTRE DE MOUSH
;"
nox'embre
i
go3.
Le Gouvernement a organisé une troupe vo–
lontaire de cavaliers à Bitlis, composée de gens
sans aveu, Turcs, qui a pour fonctton de l'aire
des tournées dans la province et d'empêcher le
passage des fédaïs à Sassoun.
De même pour empêcher l'entrée des fédaïs
dans les villages Arméniens, le gouvernement
a obligé les Arméniens d'avoir des gardes kurdes
et turcs pour chaque village; ces derniers doi–
vent surveiller étroitement et épier les opéra–
tions révolutionnaires. Mais il faut dire que
tout cela favorise davantage l'entrée des révo–
lutionnaires dans les villages. Le Gouverne–
ment se fiant à ses hommes, se contente de
leurs rapports, mais le révolutionnaire peut
entrer partout sans être vu de personne.
Les emprisonnements.
—
Ces derniers temps
une nouvelle méthode est créée pour l'empri–
sonnement et l'oppression. On ouvre les registres
de l'état civil des paysans, et on en prend un
nom quelconque -—par exemple, Archak — ;
quelques agents de police arrivent au village
pour demander quelles sont les personnes qui
portent tel nom ; les personnes ainsi trouvées,
sont, arrêtées et conduites à la prison. Puis on
les relâche, après qu'on s'est fait graisser la
patte. On recommence le même jeu, et on prend
un autre nom, par exemple, Boghoss, et ainsi
de suite. Joli moyen pour gagner de i'argent.
La révolution.
—
Ce qui est consolant pour
nous, c'est que Je peuple opprimé sent de jour
en jour que l'unique moyen de salut pour lui
consiste dans la lutte; la révolution fait des
progrès encouragée par les vifs sentiments du
peuple. Même les Turcs racontent que les révo–
lutionnaires ont établi une armée à Sassoun
sur les hauteurs de la montagne d'Andokh...
Les Turcs sont étonnés et ahuris devant cette
audace; ils avaient toujours vu le révolution–
naire agir en secret, toujours caché, mais au–
jourd'hui, son rôle est changé, il agit ouverte–
ment et publiquement, et le gouvernement turc
ne se sent pas assez fort pour lui engager la
lutte; il excite les tribus à la lutte contre les
fédaïs; mais les tribus s'y refusent.
Les temps sont changés.
Un Turc racontait que, dernièrement ie vaii
de Bitlis ayant pris en considération les mouve–
ments des fédaïs sur les hauteurs des monta–
gnes inexpugnables de Sassoun, télégraphie à
la Sublime-Porte et demande l'ordre d'aller les
anéantir et de supprimer ainsi l'affront fait au
puissant... gouvernement turc; on télégraphie
ainsi de la Sublime-Porte : « Si vous-pouvez
venir à bout avec succès dans
24
heures, les
anéantir tous, avant que la nouvelle arrive en
Europe, vous pouvez donner l'assaut». Le vali
répond :''*, Nous ne pouvons venir à bout d'eux
ni dans
24
heures et ni dans
24
jours ». •
— •
j
MACÉDOINE
La comédi e des réformes.
'
Il y a plus de joie au ciel pour un p é c h e u r
qui se r e p e n l . . . Et C'est en effet un g r and
p é c h e u r qui se repenl : on était a c c o u t u m é
h
lire dans le
Figaro
les c o mm u n i q u é s offi–
ciels ou officieux', très maladroitement ma –
q u i l l é s , de S. E . Mu n i r - P a c h a et la chose
était à ce point scandaleuse (pie le r é d a c -
letir c h a r g é à ce journal de la politique
é t r a n g è r e axait a b a n d o n n é sa rubrique,
non sans bruit : cela se terminera quelque
jour devau! les tribunaux.
Dans son n u m é r o d u 31 murs.
Le Figaro.
publie sous le liire : « L'art de s é r i e r les
r é f o rme s » une c omp l è t e palinodie.
Ce
n'est plus S. E . Mu n i r - P a c h a , c'est notre
office des affaires é t r a n g è r e s qui semble
avoir i n s p i r é l'auteur de ce sage et j u d i –
cieux article : aussi bien M . A . Net
011,
qu i
se dissimule modestement sous le pseudo–
nyme d' « Ig'Diptus » fut autrefois attaché,
au cabinet de M . De l c a s s é . No u s sommes
heureux de trouver p r é c i s éme n t en un
j o u r n a l peu suspect d'hamidophobie des
idées que nous avons maintes fois expo–
sées i c i . V o i c i l'article du
Figaro:
Les affaires macédoniennes en sont toujours au même
point. Depuis le jour où les empereurs île Russie et
d'Autriche onl arrêté, sur la terrasse du château de
MueTzsteg, les grandes lignes du m é m o r a n d u m que leur
ambassadeur respectif remettait aussitôt après à la Su-
'
bîime Porte, on peut dire que la question n'a pas fait
un pas. Depuis la fin octobre, i'Europe et la Turquie
discutent et 'négocient, sans avancer jamais. Et tandis
que la diplomatie s'épuise ainsi en vains efforts, les
neiges lentement fondent sur les hauts monts et, autour
des vilayets, les bandes s'organisent. C'est l'insurrec–
tion eu perspective, E n Europe, nul n'y pense. L'in–
térêt est ailleurs. Mais que des troubles surviennent
demain sur quelques points : aussitôt, on verra les
chancelleries s'inquiéter et envoyer de nouvelles et pres–
santes notes à Y l d i z - K i o s k . L a Porte les recevra -avec
calme et promettra d'y r é p o n d r e ; puis, fidèle a sa
vieille tactique, elle luttera pied à pied pour éluder tout
engagement. Et les semaines et les mois se passeront
à ergoter sur des textes.
Pour l'instant, il s'au'il de l'organisation de la gendar–
merie macédonienne et, en particulier, des pouvoirs à
conférer aux officiers é t r a n g e r s c h a r g é s de ce nouveau
service. Et les autres réformes, direz-vous'! Patience,
11
n'y a guère qu'un an qu'on en parle avec quelque
suite. Ne faut-il pas procéder avec ordre et discerne–
ment. N'importe-t-il pas de sérier les réformes, ajoute
la Sublime Porte '.' A u surplus, y a-t-il rien de plus
Fonds A.R.A.M