Ce n'est pas ici le lieu de redire les
paroles prononcées
ni de satisfaire la
curiosité
du haut commissaire
otto–
man Ali Ferouh bey que de telles ma–
nifestations
inquiétèrent
grandement :
cependant nous lui pouvons
révéler
sans inconvénient
le sens général de ces
entreliens avant de quitter à
Philip-
popoli, le père de Bédros
Seremdjian.
pendu à Andrinople
par ordre de
S.
M. L, en compagnie de deux Ma–
cédoniens
el d'un autre
Arménien,
nous avons promis au vieillard que nous
ferions,
nos
amis et nous, tout ce qui
était en noire pouvoir, pour que la
mort de son fis et de ses compagnons
n'eût pas été inutile. Nous
tiendrons
parole et nous nous emploierons,
selon
nos
forces, à libérer du joug harni–
dien l'Arménie
el la
Macédoine.
»
LES COMBATS DE PASSEN
L E T T R E DES FlîON'JTLTiES TC lit :o-p. ! ISSES.
L e 15 septembre, dans le village de X . . . ,
r é g n a i t un d é s a r r o i extraordinaire, les
paysans couraient de tous c ô t é s d'un air
joyeux ; quelque chose de my s t é r i e u x se
passait partout.
L e s paysans s'efforçaient
d'accueillir
avec le plus grand honneur possible la
bande des fédaïs c omp o s é e de 53 cavaliers,
qui allait b i e n t ô t passer au pays des souf–
frances, pour porter secours et assistance
à la patrie en péril.
lia nuit, ces pionniers de la l i b e r t é s'é–
taient r é u n i s dans l'église du village pour
se confesser et c ommun i e r , ou bien, pour
entendre de la bouche m ê m e du c u r é du
village l ' a r r ê t de leur mort ; la joie brillait
sur la figure de lous, et ils regardaient
droit à la mort el ne la craignaient point ;
le soldat de la l i b e r t é mé p r i s e l a mort.
Outre ces 53 cavaliers, dans un autre
village, à l a m ê m e date, 91 autre soldais
é t a i e n t r é u n i s : c'étaient les fantassins.
L e 16 du mois, vers le ma l i n , l'église du
village était remplie de paysans et de sol–
dats. L e p r ê t r e , a p r è s avoir dit la messe,
b é n i t le drapeau des fédaïs et fait un ser–
mon ; les paroles du p r ê t r e remplissent les
fédaïs d'enthousiasme et d ' é n e r g i e ; i l tire
soudain, à l'instant solennel, une é p é e r o u i l -
lée de dessous sa soutane et s'écrie : « Mes
chers enfanls, voici une é p é e que j ' a i héri–
tée de mon p è r e : celui-ci, le j o u r de sa
mort, me donnant cette é p é e , me fit j u r e r
de ne point oublier la force de celle arme ;
plusieurs a n n é e s se sont é c o u l é e s depuis ;
moi, je fus s a c r é p r ê l r e , mais je n'ai point
o u b l i é la force de la sainte é p é e ; j ' a i tou–
jours a d o r é la c . o i x en m ê m e temps que
l'épée, car je sais que nous pouvons c on –
server le triomphe par l'épée seule. »
O u and le p r ê l r e cessa de parler, les fé–
d a ï s embrasseront le drapeau bénit un à un
et sortirent ensuite de l'église.
La petite bande élait p r ê l e à partir ; les
fédaïs é
r m é s de pied en cap ; mais
les paysans ne veulent point les quitter
sans les avoir h o n o r é s d'un repas frugal.
Le 17 d u mois, le soir, fut. servi un grand
d î n e r , el les f é d a ï s p r ê t è r e n t l ou s serment
de garder inlact l'honneur de fédaï, de
ne point trahir les armes de salut et de res–
ter toujours fidèles à leur mission.
Ap r è s le d î n e r , les Cédais parlirent.
Une j o u r n é e s'était à peine é c o u l é e a p r è s
leur d é p a r t que nous a p p r î m e s que les
fédaïs avaient livré un g r and c omb a l .
La bande des fantassins était déjà partie
un jour avant les cavaliers par u n court
chemin ; mais la d e u x i è m e huit de son
d é p a r t elle rencontre des paires kurdes
qui poussent des cris, et la bande est o b l i –
g é e do changer rie d i r e c t i on pou r ne pas
faire c o i ma î l r e son passage. Mais quelque
temps a p r è s , elle est de nouveau a p e r ç u e
par des Ku r d e s q u i commencent à tirer des
coups de fusil ; la bande ne r é p o n d point
et continue son c h emi n , et elle arrive à tra
verser l ' Ar a x .
Dès l'aube, la l u l l e commence sur les
bords de l ' Ar a x ; S é r o p , vieillard de soixante
ans, a p r è s s'être frayé un passage dans la
foule des Kurdes et des soldats turcs, ar–
rive sans encombre au village de X . , e l i l
se réfugie dans u n fenil d'où i l continue
la lutte q u i dure j u s qu ' au soir ; le brave
soldai tombe sous le feu de l'ennemi.
Une aulre bande livrait combat à ce mo–
ment dans la plaine ; a p r è s une lulle h é –
r o ï q u e , les fédaïs, par suite de manque
d'eau se voient o b l i g é s de q u i l l c r leurs po–
sitions ; à ce moment, ils a p e r ç o i v e n t les
cavaliers turcs q u i , ayant laissé do Côté
leurs chevaux, livraient combat à leurs
camarades ; ils leur e n l è v e n t huit chevaux
c l à la t omb é e de la nuit, ils se r é u n i s s e n t
et a p r è s avoir p a s s é par les lignes de l ' e n –
nemi, ils disparaissent.
L a m ê m e nuit, la bande de fédaïs com–
p o s é e de cavaliers arrive au village de
Ko u r a l z o r ; elle apprend q u ' i l se trouve des
soldats dans le village et que l a bande des
fantassins livre combat aux environs de
Uz v é r a n ; elle s'y dirige i mm é d i a t e m e n t .
L e 19 d u mois, le matin, les cavaliers tra–
versent la montagne de P o l z i k et rencon–
trent une vingtaine de leurs camarades
fanlassins ; à peine les f é d a ï s avaient-ils
o c c u p é des positions qu ' i l s sont a p e r ç u s
par les Ku r d e s ; les soldats arrivent à m i d i :
une lulle a c h a r n é e commence et dure pen–
dant dix heures ; g r â c e à leurs positions,
les fédaïs n'ont aucune perte ; l'ennemi
laisse s u r p l a c e quelques dizaines de cada–
vres ; à l a t o m b é e de l a n u i l , les A r mé n i e n s
se d i r i gen t vers Uz v é r a n pour y passer la
n u i l , mais ne pouvant y p é n é t r e r , ils lias–
sent l a n u i l à Ko u s a l z a r ; vers l'aube, le
combat recommence ; les Tu r c s bombar–
dent le village, mais aucun d é g â t n'en est
c a u s é ; les fédaïs hissent le drapeau sur le
l o i l et combattent en chantant ; j u s q u ' à
m i d i , les soldats lurcs lancent cent obu s ;
à m i d i , le feu cesse pou r recommencer le
soir. Vers le soir, les Tu r c s attaquent les
positions o c c u p é e s par les A r m é n i e n s ; ils
s'emparent d'une des positions importan–
tes, mais les fédaïs pour é c h a p p e r à leur
situation difficile, attaquent les soldats, et
a p r è s un combat corps à corps, les soldats
lurcs se retirent vers Ha s s a n - Ka l é .
Les A r m é n i e n s s'emparent de quinze
chevaux et de quatre fusils mauser ; les
fédaïs voyant qu ' i l s manquaient presque
de provisions, se d é c i d e n t à retourner à la
frontière pour s'y approvisionner. Chemin
faisant, ils ont eu à soutenir une nouvelle
lutte, mais ils arrivent à couper le cordon
des Iroupes ennemies et se d i r i gen t en
avant.
Les A r m é n i e n s ont eu 40 morts et 9 pri–
sonniers.
Les Tu r c s et les Ku r d e s ont eu, à ce
qu'ils racontent, une perte de 600 person–
nes environ ; mais le c on s u l russe d'Erz-
r o um estime l a perte des Tu r c s et des
Ku r d e s à 850 hommes.
Les combats de Passen ont s e m é la ter–
reur et l ' é p o u v a n t e partout ; les Tu r c s et
les Ku r d e s 1res i mp r e s s i o n n é s par ces lut–
tes sanglantes, parlent des fédaïs avec ad–
mi r a t i on et é p o u v a n t e .
L e fédaï est r e s t é fidèle à son serment et
a g a r d é haut son drapeau r é v o l u t i o n n a i r e .
L A R U S S I F I C A T I O N A U C A U C A S E
L'affaire de Bakou
On mande de S a i n t - P é t e r s b o u r g , 17 fé–
vrier, d ' a p r è s une information r e ç u e de
B a k o u .
L e c l e r g é a r m é n i e n c é l é b r a i t hier un
Te Deum
solennel pour le s u c c è s des
armes russes. A la (in du
Te Deum,
pen–
dant le chant de l'hymne na t i ona l , une
bombe fut l a n c é e sur les officiants. Kl le
é c l a t a , blessant plusieurs personnes donl
deux ont s u c c o m b é à leurs blessures.
Qu a nd l ' émo t i o n c a u s é e par ces morts fut
c a l mé e , le chapitre, portant un portrait du
tsar se rendit à la ma i s on du gouverneur.
11
pria celui-ci d'envoyer au Isar l'expres–
sion de ses sentiments de loyalisme et
Fonds A.R.A.M