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Les Arméniens ont été souvent accusés de man–
quer de courage et beaucoup de gens s'étonnent que
trois cent mille hommes se soient laissé égorger
«
comme des moutons », sans opposer de résistance à
leurs bourreaux. Mais on néglige de dire que les Armé–
niens, entièrement désarmés, aussi bien à Constanti–
nople que dans les provinces, étaient en présence de
troupes régulières, de policiers et de hamidiés, ou de
simples assassins non officiels, munis d'armes excel–
lentes, et il faut n'avoir jamais vu une foule parisienne
détaler devant quelques sergents de ville pour reprocher
à ces malheureux d'avoir subi la loi du plus fort.
Partout au contraire où ils ont des armes, les Armé–
niens, aussi bien que les palikares et armatoles hellènes
et les heïduks serbes ou bulgares, savent se défendre.
Lors deladernièreinsurrection deZeïtoun, i.ôoohommes
luttèrent pendant trois mois contre 5o.ooo Turcs, régu–
liers et bachi-bouzoucks ; et selon l'expression de M. de
la Boulinière, chargé d'affaires de France, « les Puis–
sances rendirent au Sultan le grand service de le tirer
d'une situation difficile et inquiétante » en négociant
un arrangement entre lui et les rebelles.
D'autres faits plus récents encore, peu ou mal connus
en Europe, montrent les Arméniens sous un autre jour
et ne permettent pas de les considérer comme voués,
par destination, au rôle pitoyable de victimes. Je rap–
porterai, à titre d'exemples, trois cas caractéristiques.
Fonds A.R.A.M