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LA TURQUIE ET LE TANZIMAT.
«
dans quelques années on ne distinguera plus que par
l'uniforme nos armées ottomanes des armées européennes.
Tout notre mérite, à nous Egyptiens, est d'avoir appris un
peu plus tôt ce qu'on saura un peu plus tard dans tout
l'Empire des Sultans. »
Sans doute le gouvernement turc avait bien mérité de
l'Europe par les efforts soutenus dont témoignait la trans–
formation radicale de son état militaire et il est vraisem–
blable que sans le
Redif
qui se trouvait alors au complet,
il ne serait point parvenu en 1853 à doubler en quelques
mois son effectif de paix et à mettre en ligne en temps
voulu à peu près autant de soldats que la Russie. C'est en
grande partie grâce à son nouveau mode d'appel et à la
ressource d'une réserve aguerrie que l'armée ottomane a
vaillamment soutenu, en Europe du moins, son premier
choc contre l'armée du Czar. Les batailles d'Oltenitza et de
Kalafat ne font pas moins honneur au réformateur de 1843
qu'à l'homme de guerre auquel la Porte avait confié
en 1854 la défense de sa frontière' danubienne.
Cependant si la nouvelle constitution militaire ottomane
mise à l'épreuve dans la campagne de Crimée, n'avait rien
de commun avec l'antique organisation des milices due au
génie des premiers conquérants, elle était loin de justifier
à cette époque le pronostic flatteur d'Ibrahim-pacha, le
vainqueur de Konieh et deNesib.
«
Dans l'armée turque, écrivait au mois de mai 1854 le
maréchal de Saint-Arnaud, il y a deux choses : un général
en chef et des soldats. De points intermédiaires, aucun.
Il n'y a pas d'officiers et encore moins de sous-officiers. »
Quant au soldat turc, qui ne sait qu'il est brave, sobre
et patient. Montecuculli l'avait ainsi jugé, et les généraux
Fonds A.R.A.M