encouragement, harcelaient continuellement les troupes franco-armé–
niennes; c'est ainsi qu'en janvier 1920, la ville de Marache, habitée par
25.000
Arméniens, s'est trouvée avec sa garnison cernée par les Turcs
qui s'acharnaient à prendre la ville d'assaut, avec l'intention de mas–
sacrer toute la population arménienne. Le colonel Brémond (actuelle–
ment général), ancien gouverneur de Cilicie, mis au courant de la situa–
tion, envoie 12.000 hommes de renfort au secours du général Querette,
défenseur de la ville de Marache. Les Turcs, pris entre deux feux,
arborent le drapeau blanc, envoient des parlementaires pour recevoir
les conditions de la reddition; mais à ce moment se produit un coup
de théâtre : le colonel Noimand apporte au général Querette l'ordre
formel d'avoir à quitter la ville de Marache dans un délai de deux
heures sans que la population arménienne soit mise au courant de ce
départ. Néanmoins, les soldats arméniens ayant alerté certains quar–
tiers, 7.000 civils ont quitté la ville avec les troupes. Vu la rigueur de
l'hiver à cette époque de l'année, cette malheureuse retraite coûte aux
Franco-Arméniens 4.000 morts, tant civils que militaires; les enfants et
les femmes surtout succombent en grand nombre. Quant aux
18.000
Arméniens restés dans la ville, ils sont impitoyablement mas–
sacrés par les janissaires turcs, et 25 soldats arméniens qui défendaient
une mosquée, abri de milliers de nos compatriotes, ignorant cette
retraite, ont péri dans les flammes avec leurs protégés.
Connaissant les sentiments arménophiles et humanitaires du général
Brémond, ainsi que la loyauté du général Querette, nous estimons
qu'aucune responsabilité ne leur incombe; le remords de ce carnage
revient à ceux qui ont facilité son accomplissement. Le général Bré–
mond et le général Querette ont été obligés de se conformer aux ins–
tructions de leurs chefs hiérarchiques, tout en déplorant, au -fond de
leur conscience, de livrer la population arménienne sans défense aux
mains de leurs pires ennemis; d'ailleurs, au moment de ces événements,
nous n'avons pas manqué de faire connaître la vérité dans notre jour–
nal « Aiguillon », du 30 novembre 1920, et depuis, aucun démenti
officiel n'a contredit nos affirmations. Aucune manœuvre stratégique
ne justifiait cette retraite,, si nous nous basons sur l'insistance du
général Querette à vouloir sauver la population de Marache et sa très
compréhensible hésitation à exécuter les ordres de ses chefs.
Malheureusement pour nous, la ville de Marache n'avait pas été
la seule victime d'une politique louche; à son tour, la ville de Hadjin
a connu les mêmes horreurs, au moment de la présence des troupes
françaises à Sis, ancienne capitale de la Petite-Arménie et la résidence
du Catholicos des Arméniens de Cilicie. Hadjin était cernée par les
Turcs; la ville était défendue par 800 combattants arméniens qui ont
tenu les troupes turques en échec pendant huit mois, attendant les
renforts promis par Adana. Les défenseurs de la ville avaient fait
savoir qu'il leur était possible de quitter Hadjin avec toute la popula-
Fonds A.R.A.M