à Paris, nous sommes dans l'obligation de dire que tout espoir a ce
sujet était pure imagination, et voici pourquoi :
Boghos Nubar Pacha, par lettre officielle, avait demandé une
audience au président Wilson, qui n'a même pas daigné donner une
réponse; notre chef ayant renouvelé sa demande, M. Wilson fait répon–
dre par son secrétaire que, son temps étant très limité, il regrettait de
ne pouvoir recevoir la Délégation arménienne, mais que si on avait
quelque chose à lui communiquer, on pouvait le faire par écrit. A notre
avh, c'était une façon de faire comprendre à la Délégation qu'au point
de vue politique, l'Arménie n'avait rien à espérer des Etats-Unis; il est
malheureux de constater que la Délégation n'a pas su distinguer cette
nuance et, malgré l'attitude hautaine de M. Wilson à l'égard de la
représentation arménienne, a persisté pour avoir, coûte que coûte, une
entrevue avec lui. Tous les moyens officiels étant épuisés, elle s'est
adressée
modestement
à l'intervention d'un pasteur arménien, M. le
professeur Agopian, qui a pu obtenir,
à titre privé, dix minutes d'en–
trevue
pour les deux chefs arméniens, Boghos Nubar Pacha et
M. Aharonian. Dans cette entrevue extrêmement limitée, on n'avait:
eu que le temps d'échanger quelques paroles de politesse, sans que la.
question arménienne fût effleurée; tout cela n'avait pas empêché notre
délégation de chanter sur tous les tons les bienfaits du mandat améri–
cain. Ce n'était pas du bon sens, c'était véritablement de la démence.
Suivant un proverbe : « Pour chanter un duo, il faut être deux »,
l'Amérique restait insensible à nos appels, parce que la nature n'avait
pas favorisé la terre arménienne de ses puits de pétrole : « The business
is business », les affaires sont les affaires. Sous ce rapport, l'Arménie
ne présentait aucun avantage pour l'Amérique. C'est là qu'il fallait"
chercher la cause de l'indifférence de nos amis américains pour notre
pays. Espérons que la leçon du passé sera un enseignement pour le
peuple arménien, qui se gardera bien, à l'avenir, de tomber dans les,
mêmes erreurs.
Nous avons critiqué la politique de notre Délégation quand elle
suivait aveuglément la directive de M. Briand et jetait dans la mêlée
cinq mille jeunes Arméniens sans avoir assuré aucun avantage pour
l'Arménie, ni même pour les combattants. Nous avons critiqué avec
plus d'acharnement encore, quand cette Délégation, après l'armistice,
faisait volte-face avec une légèreté incompréhensible et s'accrochait à
la redingote flottante du président Wilson; nous avons dit et nous
répétons que la diplomatie arménienne, ayant lié la fortune de nos
armes à celle de la France même sans aucune garantie, elle devait
rester fidèle jusqu'au bout à cette politique pour ne pas perdre au moins
l'avantage d'une situation de fait acquise.
Notre exposé détaillé, au sujet de la formation de la Légion armé–
nienne, prouve très clairement l'incompétence et L'inexpérience de nos
représentants. Notre critique n'ayant pas ménagé les dirigeants a rmé -
Fonds A.R.A.M