E n l 'Honneur de l 'Arménie
Une imposante manifestation en l'honneur de l'Arménie a eu lieu le
9
avril 1916, dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, au milieu
d'une salle bondée. La réunion était présidée par M. Paul Deschanel,
président de la Chambre des Députés, ancien président de la Républi–
que, qui avait accepté l'invitation de l'Association des « Amitiés
Franco-Etrangères » dont le président était M. Anatole France, et à
qui Ton doit l'organisation de la manifestation. Nous reproduisons ici
les résumés des éloquents discours qu'il nous a été donné d'entendre,
à cette occasion.
DISCOURS DE M. PAUL DESCHANEL
M. Deschanel, dans un discours vibrant, a défini le sens de
ht.
réunion :
«
Nous venons, a-t-il dit, préparer ici un grand acte de justice.
«
Un peuple s'est rencontré aux lieux les plus vénérables de la
terre, intelligent, laborieux, cultivé, mariant la finesse asiatique à
l'esprit de l'Europe, avant-garde de îa civilisation gréco-latine en
Orient, qui un jour mêla son destin, sous les Lusignan, à celui de la-
France; qui, après avoir goûté là puissance et la gloire, tomba sous-
le joug ottoman, et dont l'existence, depuis lors, n'a été qu'un long
supplice; tantôt le silence du sépulcre, coupé de loin en loin par un
psaume liturgique, évocation de la liberté perdue; tantôt les pillages,
les viols, les proscriptions, les conversions forcées, les exactions de
toutes sortes. Des Arméniens proscrits, errants, implorèrent l'Europe.
L'Europe, au Congrès de Berlin, se porta garante de la sécurité de
V
Arménie.
«
Promesses vaines ! Alors, de France, d'Angleterre, d'Italie, de
Russie, de Suisse, d'Amérique, des voix généreuses s'élevèrent, et
parmi elles celle de l'écrivain illustre, de ce maître de notre langue,
Anatole France. A chaque protestation nouvelle répondaient de nou–
velles tueries et cet héroïque martyre d'un peuple devenait le scandale
du genre humain.
«
C'est ce crime, un des plus grands de l'histoire, que nous venons-
îletrîr à la face du monde. Le Comité organisateur de cette manifesta–
tion a voulu lui donner un caractère exclusivement français. Tout le-;
Fonds A.R.A.M