d'Orient, aux princes d'Antioche, aux rois de Jérusalem et de Chypre,
un appui formidable durant leurs interminables luttes contre les prin–
ces musulmans d'Alep-, de Damas et du Caire. Laissant à d'autres le
soin de raconter les fastes de cette nation arménienne si calomniée,
dans les divers domaines de la civilisation, des arts et de la littérature,
je voudrais dire ici quelques mots de ce que furent, au point de vue
militaire, au Moyen Age, ces Arméniens qui, pour la plupart, aujour–
d'hui, passent pour des victimes pacifiques et résignées du plus atroce
despotisme.
La première dynastie chrétienne en Arménie fut celle des Bagratides
ou Pagratides, c'est-à-dire des fils de Pagrat. Ces princes régnaient
en Grande-Arménie, c'est-à-dire dans l'Arménie véritable qui s'étend
entre
/'
Anticaucase
et la portion orientale de la chaîne du Taurus.
Ces rois puissants furent en guerre parfois avec les empereurs byzan–
tins,, mais bien plus souvent avec les différents souverains musulmans
ou mongols. Il y eut un moment où ils eurent sous leur commandement
une puissance militaire de premier ordre. Ils protégeaient alors, contre
les attaques des nations musulmanes ou barbares, les marches orien–
tales de l'empire byzantin en Asie. Leur magnifique capitale d'Ani,
dont j'ai visité les ruines, il y a vingt ans, environnée d'une muraille
grandiose, contenait une foule de somptueux édifices aux inscriptions
lapidaires taillées dans la plus belle pierre rouge. Un certain nombre
existent encore aujourd'hui en ce site tragique sur les bords très
escarpés du fleuve Akhourian. Dynastie et capitale sombrèrent au
onzième siècle, après la plus courageuse résistance, sous les coups
répétés des invasions des Turcs Seljoukides.
Plus tard, vers le douzième siècle, une portion de cette nation armé–
nienne, fuyant la domination intolérable du vainqueur, émigra de l'au–
tre côté du Taurus, dans l'antique Cilicie. Ce fut cette fraction impor–
tante qui constitua au Moyen Age le fameux royaume chrétien de
Petite-Arménie, dont l'histoire fut depuis intimement liée à celle des
Croisades, puisqu'il était à la fois le voisin des principautés
chrétien–
nes de Syrie établies à la suite de la première de ces vastes invasions
militaires et la dernière étape des grandes expéditions qui gagnaient
la Syrie par Constantinople et l'Asie Mineure.
La frontière orientale de ce petit royaume se confondait avec celle
des terres franques et s'étendait jusqu'à une faible distance de cette
vallée de l'Oronte, alors fertile et populeuse où s'élevait, entourée de
sa haute et magnifique ceinture de tours et de murailles, la grande
cité d'Antioche, capitale de la principauté de ce nom. L'histoire de ce
royaume d'Arménie, de cette petite souveraineté chrétienne du Moyen
Age, d'abord blottie dans les profondes vallées de l'âpre chaîne du
Taurus, puis s'étendant peu à peu jusqu'au rivage du golfe de Cilicie,
est des plus intéressantes. Les Arméniens établis, je l'ai dit, en ces con–
trées vers le douzième siècle, race vivace et énergique, luttèrent inces-
Fonds A.R.A.M