risque, en cas de malechance, de tomber dans la misère et d'être obligé
de tendre la main à son voisin.
La fierté native du Français l'empêche de pratiquer la mendicité; il
a horreur de ce métier avilissant et sa sympathie est-acquise à celui qui
travaille et produit; le travail est la seule religion du Français, qui
guide sa destinée.
Le Français est très sociable et très humain; tout en défendant éner-
giquement le produit de son travail, il vous reconnaît le droit d'en faire
autant, il n'est ni jaloux, ni rancunier, pourvu que, dans son pays,
vous n'ayez pas la prétention de lui faire une concurrence déloyale
et de lui enlever le morceau de pain de ses enfants. Avant tout, comme
de juste, il veut être nourri lui-même; à sa place, nous serions peut-
être plus exigeants. Tout étranger respectueux des lois du pays ne sera
jamais inquiété, soit de la part de la population, soit de la part des
autorités, s'il se contente d'avoir sa place au beau soleil de France,
par un travail honnête. Le Français est bon enfant, bon camarade,
mais i l n'aime pas qu'on le prenne pour une poire; si, souvent, par
une délicatesse de sa race, il ne vous dit pas carrément sa manière
de penser à votre égard, i l n'en pense pas moins; si sa bouche ne pro–
nonce pas un mot, son attitude réservée est le signe extérieur de son
mécontentement, et cette nuance ne doit pas échapper à tous les étran–
gers qui viennent en France et qui ont tout intérêt à vivre en bonne
intelligence avec le peuple qui leur donne l'hospitalité.
Le sentiment de justice est inné chez le Français; il est le défenseur
naturel de toutes les causes qui sont justes; il est peut-être plus lent
à
payer de sa personne pour défendre les grandes idées humanitaires,
comme ses ancêtres ; mais le siècle de matérialisme où nous vivons
actuellement, où la concurrence économique universelle, tient la pre–
mière place dans l'existence des nations ne lui permet plus de tirer les
marrons du feu pour les beaux yeux des autres. Les peuples sont
emportés par un souffle d'égoïsme,
à
l'exemple des Anglo-Saxons, et
la France est obligée de lutter
à
armes égales, pour ne pas être la pre–
mière victime des appétits insatiables des autres grandes nations, ayant
le souci primordial, dans la lutte universelle, de conserver avant tout
son patrimoine national. L'idéalisme français, au contact de la réalité
actuelle, sommeille momentanément, mais
à
!
a première occasion, i l
se manifestera avec plus de vigueur et avec plus d'intensité, comme en
1914,
au cours de la conflagration générale.
La plupart des étrangers sont loin de saisir la mentalité française et
ils ont l'habitude de juger superficiellement une question qu'ils n'ont
jamais pris la peine d'étudier à fond; pourtant, pour un observateur
consciencieux, i l n'est pas difficile de constater que cet esprit de jus–
tice, on le rencontre
à
chaque pas, chez presque tous les Français,
dans toutes les classes de la société, sans distinction, à tel point que
les pouvoirs publics sont obligés, pour ainsi dire, de tâter le pouls de
Fonds A.R.A.M