Le Traité de Sèvres, le Traité de Lausanne
et le Traité d'AIexandropol
= et M. CLEMENCEAU =
Avec le traité de Sèvres, signé le 10 août 1920 entre les alliés et
l'Arménie, d'une part, et la Turquie d'autre part, nous obtenions les
départements d'Erzeroum, Van, Bitlis, Trébizonde et le petit port de
Rizé, entre Batoum et Trébizonde, pour avoir un accès à la mer Noire,
à l'exception de la ville de Trébizonde, mais sur l'arbitrage de
M. Wilson, réclamé par le Conseil Suprême, la ville de Trébizonde
nous revenait aussi.
M. Clemenceau, le Père La Victoire, avait vigoureusement enfoncé
ses griffes de tigre dans le corps du Turc, et il ne voulait plus lâcher
sa proie pour arracher définitivement les chrétiens d'Orient à la san–
glante tyrannie turque; dans cette œuvre d'humanité, le Grand Fran–
çais était admirablement secondé par le bulldog gallois, M. Lloyd
George, lequel nourrissait les mêmes sentiments de mépris à l'égard
des janissaires turcs. Ce travail d'épuration devait s'exécuter sous les
yeux bienveillants du pasteur Wilson qui avait enfin trouvé l'unique
occasion de mettre son évangile en pratique.
Il est bien entendu que la Russie était absente à ce traité. C'était
pourtant la seule grande puissance qui pouvait veiller efficacement à
l'exécution des clauses du traité concernant la Grande-Arménie. Ce
traité, pour avoir une valeur pratique, aurait dû être consacré et ga–
ranti par la Russie, unique puissance limitrophe de l'Arménie, car ni
la France, ni l'Angleterre, ni l'Italie, ni même l'Amérique, ne pouvaient
assurer l'exécution du traité de Sèvres sans la participation de la
Russie. Voilà pourquoi la plus élémentaire logique imposait le devoir
au gouvernement arménien de l'époque d'assurer à tout prix le con–
sentement de la Russie, même avec certaines concessions. Il est
malheureux de constater que, comme nous l'avons dit précédemment,
la Commission arménienne envoyée à Moscou, par son intransigeance
et par sa fanfaronnade, a exaspéré la patience des dirigeants russes
qui ne demandaient pas mieux que de s'entendre avec les Arméniens,
en sachant qu'ils pouvaient toujours compter sur la fidélité du peuple
arménien au Caucase comme lavant-garde de la réalisation des aspi–
rations russes sur Constantinople, espérances dont la réalisation n'est
qu'une question de temps.
Fonds A.R.A.M